En 2004, à seulement 31 ans, Christian Horner devenait le plus jeune directeur d’équipe en F1 en prenant les commandes de Red Bull. Treize années plus tard, Horner est toujours fidèle au poste, même s’il a dû faire face au départ de Bernie Ecclestone, dont il était un proche, et à la domination de Mercedes depuis 2014.
Avec les nouveaux propriétaires de Liberty Media, la F1 est désormais « à un tournant » selon les dires de Christian Horner.
Prudent si ce n’est sceptique, Horner ne se joint pas à l’enthousiasme général autour de Liberty Media et précise que « le temps dira » si la direction que prend la F1 est la bonne. « Le style de Bernie était très dictatorial » reconnaît-il néanamoins, ajoutant que les Américains procèdent désormais de « manière très différente. »
« Bernie dirigeait la F1 absolument comme il le voulait. Quand il était à son apogée, avec Max Mosley, il dirigeait tout. En réalité, il ne prêtait probablement pas une grande attention aux fans, mais aux chiffres. On pourrait dire que l’ambiance est plus détendue maintenant. Et certainement, on s’occupe bien plus des fans, ce qui est bien. »
Un temps annoncé comme le potentiel successeur de Bernie, Christian Horner aurait sans doute enterré le plus vite possible les V6 Turbo actuels dont l’introduction a fait « incroyablement mal à la F1 » selon lui.
« Du point de vue des coûts, du point de vue du spectacle, du point de vue de la compétition… ce moteur a été un désastre. Avec le son de ces moteurs, les courses sont comme un concert de pop ou de rock avec beaucoup moins de son. Or le son faisait partie de l’ADN du sport… Et les fans, dans les tribunes, ne peuvent pas comprendre ou voir cette technologie. »
Selon Horner, Ecclestone était « assez vieux et sage » pour voir que ce moteur nuisait à la F1. « Mais il n’a pu y mettre un terme. »
La fin des moteurs actuels n’est programmée que pour 2021. Or il est d’ores et déjà temps de penser à l’architecture générale des prochaines unités de puissances, qui devront être avant tout « simples ». Entre les motoristes (y compris des indépendants dont Christian Horner souhaite l’arrivée), les performances devront aussi être plus semblables selon le directeur de Red Bull.
Mais pour Horner, ne faudrait-il pas surtout imiter l’industrie auto et faire donc un grand pas vers l’électrique ?
« Vous avez plusieurs gouvernements et manufacturiers qui disent que les voitures seront électriques ou autonomes en 2030. Mais selon moi, la F1 est à un tournant. Quel est son objectif ? Nous avons la Formule E, et beaucoup de manufacturiers s’y engagent. Mais en termes d’émotion et de divertissement, le compte n’y est pas avec ces voitures. »
« Je pense que la F1, finalement, c’est un homme et une machine, qui sont à leurs limites absolues. C’est des courses de chars modernes ! Ou ça devrait y ressembler… Personnellement, je retournerais aux V12. Le bruit serait formidable, et je mettrais aussi des cockpits ouverts pour que les pilotes soient de nouveau des héros. J’accepte le fait que le régulateur [la FIA] et le détenteur des droits commerciaux ne puissent pas aller aussi loin. Mais ils préfèrent cette orientation à une guerre technologique - que le spectateur dans les tribunes ne peut comprendre. »
Il est vrai aussi que réduire considérablement l’importance du facteur moteur serait une bonne nouvelle pour Red Bull, qui ne peut construire sa propre unité de puissance…
« J’accepte cette accusation. Mais ne prêtez pas attention à ce genre de choses pour le moment. Les changements apportés par Liberty vont affecter la prochaine décennie. C’est si important de prendre la bonne décision… Ils ont les bonnes personnes aux bonnes responsabilités, avec Ross Brawn, et les gens qui l’entourent. Ross est un penseur, un stratège. Nous devons lui faire confiance, à lui et à Chase Carey, pour faire ce qu’il faut faire. »