La première impression n’est souvent pas la bonne : c’est ce qu’a pu constater James Allison, le directeur technique de Mercedes, lorsqu’il a commencé à collaborer avec Lewis Hamilton. Très franc, l’ancien dirigeant de la Scuderia Ferrari a reconnu qu’il ne croyait pas à la sincérité du pilote anglais et à la plupart de ses déclarations avant de le connaître.
« Il va probablement se fâcher contre moi, mais avant de rejoindre Mercedes, il me semblait qu’il n’était pas tout à fait sincère quand il s’exprimait » lance James Allison, « et j’avais l’habitude de penser le pire de lui. S’il disait qu’il avait signé son meilleur tour en qualifications, je pensais : ‘pourquoi dire cela alors que tu as déjà réalisé des centaines de tours de poles tout à fait brillants ?!’ »
Les préjugés de James Allison ont été ensuite vivement démentis, comme il le reconnaît lui-même aujourd’hui.
« Mais une fois à l’intérieur de l’équipe, vous savez qu’il est sincère. Il vous dira candidement qu’il n’a pas une mémoire brillante, donc chaque tour lui paraît être le meilleur dans son esprit. Il est très motivé par ce ce qu’il réussit, si bien que ses commentaires sont tout à fait puérils, et tout à fait charmants. Mais de l’extérieur, je les trouvais tout à fait sans charme. »
Une tragédie a également rapproché James Allison de Lewis Hamilton : lorsque l’ingénieur a perdu sa femme, victime d’une méningite, le pilote anglais a été à ses côtés.
« Il a eu un désir totalement désintéressé de me dire qu’il était désolé pour ma femme, et qu’il était disponible pour en parler plus tard. C’est très inhabituel chez un pilote. J’ai vu beaucoup de gens essayer de gérer un évènement aussi choquant, d’une manière qui était maladroite ou peu convaincante. Beaucoup de gens ne voulaient pas mettre le sujet sur la table. Sa réaction nous a sérieusement permis de commencer à nous rapprocher et cela m’a montré que c’était quelqu’un de bien. »
« Lewis est une superstar et les superstars n’ont pas les mêmes vies que nous. Mais l’homme derrière cette façade est très appréciable. »
Avec Billy Monger, ce jeune pilote amputé des deux jambes, Lewis Hamilton a été aussi très bienveillant et a fait preuve de beaucoup d’empathie, poursuit James Allison.
« Les caméras n’ont jamais filmé cela, mais ils étaient tous les deux souvent en train de parler, pendant longtemps. Il n’avait aucun intérêt à cela, si ce n’est son propre plaisir. Je trouvais difficile de voir ce jeune garçon avec ses blessures, avec sa famille autour de lui. Nous avions tous l’opportunité de lui parler mais personne ne l’a fait comme Lewis l’a fait. »
« Au quotidien, dans son travail, il n’essaie pas d’aborder chaque situation comme s’il était le mâle alpha dans la pièce. Il sait que nous sommes tous des parties différentes de l’équipe et qu’il doit nous laisser une marge pour que nous fassions son travail pour lui. Ses débriefs ne sont pas particulièrement longs ou courts. Quand il faut parler de quelque chose, ils sont aussi longs que nécessaires. Il s’assoit avec un petit calepin et il écrit des choses tout au long du week-end. Parfois, il oublie certaines choses que nous lui avons dites. Mais il écrit ce qui est important pour lui. »
« Il est devenu plus fort au fur et à mesure de la saison. C’est comme s’il doit savoir qui sont ses rivaux. Et ensuite, il se perfectionne quand la compétition devient plus intense. Curieusement, c’est alors plus facile de travailler avec lui. Il pardonne davantage nos erreurs, il devient plus concentré sur son combat, il devient un coéquipier plus puissant. Cette saison, c’était juste une arme pour nous. »