Liberty Media entend rapprocher les performances entre les écuries, à partir de 2021, pour rendre les courses plus spectaculaires et plus imprévisibles. Les Américains veulent encore rendre la compétition financièrement viable pour les écuries privées.
Pour arriver à ces deux objectifs, le projet de budgets plafonnés semble être la solution retenue par Liberty Media, qui dévoilera ses plans au paddock à la mi-saison.
Ross Brawn, le manager des sports mécaniques, confirme que les budgets capés pourraient bientôt devenir une réalité pour la Formule 1.
« Nous devons créer un environnement attractif pour les plus petites écuries. La dernière équipe qui a quitté la F1 était Manor. Personne n’a voulu la racheter. Donc quelque chose ne va pas en F1. Nous devons créer un environnement qui aide les équipes à survivre si elles sont raisonnablement viables. Il faut faire en sorte qu’une écurie puisse toujours faire du bon boulot même avec un sponsor modeste. »
« Nous voulons aussi rendre les voitures attractives visuellement et spectaculaires. Cela requiert un règlement approprié au niveau technique et sportif. Nous ne voulons pas que le résultat d’une course soit prévisible. Par exemple, les voitures cassent rarement de nos jours. C’est une formidable réussite technique, certainement, mais malheureusement, cela ne produit pas de bonnes histoires à raconter. Rappelez-vous les scènes déchirantes quand une voiture s’arrête lors des derniers tours. C’était une tragédie sportive ; mais vous vous rappellerez toujours de ce moment. C’est le sport. »
« C’est important d’avoir des voitures pouvant courir l’une contre l’autre. La voiture doit être belle à regarder sur la piste. Peu importe que les voitures soient deux secondes plus rapides ou plus lentes, personne ne le remarque. Elles seront toujours les voitures les plus rapides au monde. La vitesse est difficile à remarquer. Par exemple une Moto GP est 30 secondes plus lente qu’une F1, mais elle semble vraiment rapide. »
« L’impression qui demeure, c’est que la Moto GP est une moto spectaculaire et que les pilotes peuvent amener toujours leurs machines à leurs limites, sans prêter beaucoup d’attention aux pneus, aux freins ou aux moteurs, afin de pouvoir se battre ensemble. En F1 nous avons connu des courses formidables sous la pluie. Personne ne s’est plaint que les voitures étaient alors 15 secondes plus lentes… »
Le budget plafonné est une voie qu’explore sérieusement Liberty Media, mais Ross Brawn confirme ainsi qu’une refonte du règlement aérodynamique est un chemin privilégié pour rendre les courses plus animées.
« L’aérodynamique explique principalement pourquoi les temps au tour sont spectaculaires. L’adhérence est incroyable. Mais pour le moment il est très difficile de suivre une autre voiture. Nous pensons, de nos analyses, que ce problème peut être réduit grâce à certaines règles. Nous ferons nos propositions aux équipes après avoir achevé notre étude. »
« Nous devons aussi mieux intégrer le halo dans le design des voitures, pour que le halo n’ait pas l’aspect d’un simple add-on aux F1. »
Sur le plan de la performance pure, Liberty Media a donc un vaste chantier à mener. Mais Ross Brawn se penchera aussi sur l’esthétique des monoplaces, qu’il trouve insuffisamment approfondie. Alain Prost a d’ailleurs avoué qu’il ne trouvait "pas belles" les F1 actuelles.
« Nous voulons qu’une F1 puisse inspirer des gens, qu’une F1 puisse symboliser toute une époque. Les voitures actuelles n’ont certainement pas les designs les plus élégants. L’esthétique pourrait être améliorée de manière significative. »
« C’est parce que nous avons écrit des règles sans se préoccuper de l’aspect des voitures. Et nous ne pouvions pas changer rapidement les choses, ce n’était pas à notre portée. Dans le futur, nous avons besoin d’un processus de décision plus rapide pour qu’il soit plus facile de corriger des erreurs manifestes. »
Enfin, Ross Brawn confirme qu’il voudra toujours que la F1 s’appuie sur des écuries privées et sur des manufacturiers. Pour ce faire, un équilibre devra être trouvé dans le règlement moteur, qui devra être suffisamment pointu technologiquement, sans provoquer de hausse générale des coûts.
« Une partie de la magie de la F1, c’est le mélange entre manufacturiers et écuries privées. Nous devons trouver un juste milieu, en particulier pour le règlement moteur. Si nous avions toujours des V8, aurions-nous attiré de nouveaux manufacturiers ? Je ne pense pas. Personne ne construit plus des moteurs atmosphériques consommant autant aujourd’hui. »
« D’un autre côté, une technologie hautement complexe comme le MGU-H peut effrayer certains motoristes. Nous sommes heureux d’avoir quatre constructeurs pour le moment. C’est un bon nombre. Mais nous devons respecter les investissements des manufacturiers, tout en pensant à en attirer davantage. Avec le règlement actuel, nous n’avons aucune chance d’y arriver, pas même pour attirer un manufacturier indépendant qui serait aidé par un sponsor. »
« La MGU-H, c’est un sujet qui est sur la table. Il y a sept ans, quand elle a été introduite, cette technologie semblait pertinente, mais l’industrie automobile ne l’a pas adoptée. »
Les prochaines règles moteur devraient logiquement voir la disparition de cette pièce qui a causé tant de difficultés à Honda et Renault ces dernières saisons.