À l’instar de beaucoup de gens, l’ancien pilote David Coulthard n’en a pas cru ses yeux ce dimanche à Monaco en voyant Lewis Hamilton s’arrêter à 15 tours de la fin pour changer ses pneus et émerger de la voie des stands en troisième position alors qu’il avait jusque là écrasé la concurrence. En cause : une décision de l’équipe mal avisée, qui risque de laisser des séquelles si l’on en croit Coulthard.
« La décision qui a coûté le Grand Prix de Monaco à Lewis Hamilton, et qu’après des heures de réflexion je ne parviens toujours pas à expliquer, va ébrécher la confiance de Lewis envers son équipe. Une instruction en provenance du muret des stands n’a pas toujours à être suivie mais, si le pilote commence à douter de chaque décision, les fondamentaux commencent à vaciller. »
« Je ne comprends toujours pas ce qui s’est passé, sur le moment j’ai supposé que Lewis avait dû souffrir d’une crevaison ou d’un problème mécanique, et il aurait alors été acceptable de l’arrêter pour limiter la casse. Mais il se trouve que ce n’est qu’une erreur de jugement très coûteuse, et l’équipe a été bien trop prudente. Lewis était dans une situation très confortable, et ce n’est pas comme s’il s’agissait d’un nouveau départ à Monza à quelques tours de la fin : c’était Monte Carlo, un circuit où les dépassements sont quasiment impossibles, et Lewis était le plus rapide tout le week-end. »
Coulthard s’attendait en revanche à ce que Hamilton réagisse comme Ayrton Senna en 1988, à savoir qu’il rentre directement s’enfermer dans son appartement. Mais il n’en a rien été, et l’Écossais souligne le professionnalisme du pilote Mercedes.
« En 2011, Lewis aurait probablement enfoncé son équipe. Mais il s’est aujourd’hui montré irréprochable, même dans ce qu’on pourrait qualifier de tragédie, puisque Nico Rosberg lui-même a quasiment reconnu que ce n’était pas le bon pilote qui avait gagné. Lewis a ainsi montré combien il a mûri. »
Plus inattendu, Coulthard se dit presque « réconforté » par cette erreur de stratégie, soulignant ce côté humain alors qu’on parlerait presque de voitures qui se pilotent toutes seules actuellement.
« Ce qui nous a choqué, c’est qu’une victoire quasi-certaine s’est envolée non pas à cause d’un problème mécanique, mais d’une erreur humaine. La Formule 1 s’en retrouve à nouveau humanisée et cela nous rappelle que le cœur du sport n’est pas la technologie mais les gens. Finalement, qu’on utilise des moteurs diesel, turbo, V12 ou V10, les mécaniques et les hommes souffrent et se battent pour devancer les autres : c’est ça que nous voulons voir, et c’est encourageant. »
« La réaction de Mercedes est aussi plaisante : ils se sont eux-mêmes incriminés – il faut dire que c’était une erreur extrêmement flagrante – mais nous ne sommes plus habitués à autant d’honnêteté en Formule 1. Je ne pense d’ailleurs pas que Niki Lauda soit physiquement capable de ne pas dire ce qu’il pense. »
« Lewis reviendra au Canada sachant qu’il est rapide, mais il lui faudra du temps pour panser ses blessures et reconstruire une totale confiance dans son équipe, » conclut Coulthard.