Placé en garde à vue depuis son arrestation en novembre au Japon, Carlos Ghosn, qui demeure le PDG de Renault, a pu, enfin, s’exprimer devant la justice japonaise, ce mardi à Tokyo.
Lors de cette intervention, qui n’a pas été filmée, Ghosn a clamé, en anglais, son innocence de toutes les charges qui lui sont reprochées (dissimulation d’une partie de ses revenus, acquisition de biens privés sur les fonds de l’alliance Renault-Nissan).
« J’ai été accusé à tort et injustement détenu sur la base d’accusations infondées. Contrairement aux accusations des procureurs, j’ai agi avec l’approbation des dirigeants de Nissan et je n’ai jamais reçu de compensation illicite. »
« Je crois fermement que dans tous mes efforts conduits au nom de l’entreprise, j’ai agi honorablement, en toute légalité et avec l’approbation des dirigeants appropriés au sein de l’entreprise. »
« Je n’ai jamais reçu de compensation de Nissan non publiée, et ne suis jamais entré dans une relation contractuelle avec Nissan pour recevoir un montant fixe qui n’a pas été publié. »
« Mon engagement moral envers Nissan ne me permettrait pas de démissionner de mes fonctions durant ce moment crucial. Un capitaine ne quitte pas son navire au milieu d’une tempête. »
Carlos Ghosn a en outre rappelé qu’il avait consacré « deux décennies de sa vie à relever Nissan et bâtir l’alliance », une entreprise qu’il continue « d’aimer. »
Le juge japonais Yuichi Tada a, lors de cette audience, expliqué pourquoi l’homme d’affaires avait été retenu au Japon pendant autant de semaines : la justice craint qu’il quitte l’archipel nippon dès que possible, et redoute également de possibles dissimulations de preuve(s).
Selon les avocats de Carlos Ghosn en revanche, plus aucun motif raisonnable ne justifie encore la détention de leur client le temps que l’enquête japonaise se termine. Les avocats de la défense ont donc demandé la fin de la détention du PDG de Renault.
Motonari Otsuru, ancien procureur, qui dirige aujourd’hui la défense de Carlos Ghosn, est cependant pessimiste sur les chances de libération de son client. Ghosn pourrait ainsi rester en garde à vue pendant un semestre, avant qu’un procès ne soit officiellement ouvert. Cette pratique est courante au Japon.
Le gouvernement français a réagi à ces premières déclarations de Carlos Ghosn. « La présomption d’innocence doit absolument être respectée » a rappelé Muriel Pénicaud, ministre du Travail. « Le plus important aujourd’hui c’est que cette présomption d’innocence soit respectée et qu’on veille à l’alliance Renault-Nissan. Il y a beaucoup d’emplois à la clef, il y a beaucoup de sujets économiques et sociaux. »
Elisabeth Borne, ministre des Transports, a elle répondu à une question épineuse : si Carlos Ghosn devait rester en garde à vue pendant un semestre, ne faudrait-il pas songer à le remplacer dès aujourd’hui ? « Il y a une gouvernance transitoire qui a été mise en place. Évidemment, si cet empêchement devait durer, il faudrait en tirer les conséquences. Mais aujourd’hui il y a un principe de présomption d’innocence qui doit être respecté. Le gouvernement n’a pas d’éléments qui pourrait nous conduire à conclure à la culpabilité de M. Ghosn. »
Les conséquences de la garde à vue de Carlos Ghosn sur le fonctionnement de Renault F1 devraient être assez limitées à court terme : le management de l’écurie dispose d’une large autonomie, selon les vœux mêmes de Carlos Ghosn lors du rachat de Lotus.
Mise à jour : Les juges ont refusé de libérer Carlos Ghosn ce matin, sa détention provisoire persiste donc.