Michelin l’a annoncé, Jean Todt l’a confirmé ce week-end à Monza : la firme clermontoise n’a pas participé à l’appel d’offres pour devenir le prochain fournisseur pneumatique en F1, pour la période 2020-2023.
Parmi les raisons évoquées par Michelin, une peut interpeller les ingénieurs de la F1 : une dégradation trop élevée des pneus ne serait pas intéressante pour l’image de Michelin, ou pour démontrer tout le savoir-faire de leurs spécialistes en termes de durée de vie.
Ben Agathangelou, chef de l’aérodynamique chez Haas, comprend-t-il la position exprimée par Michelin ?
« Nous pouvons voir la nature des pneus avec lesquels nous roulons aujourd’hui. Bien sûr, le sport a immensément évolué ces quatre ou cinq dernières années, au niveau de la compréhension, de la gestion et de l’utilisation stratégique du comportement des pneus que nous avons. Au bout du compte, je ne peux pas parler à la place de Michelin pour expliquer leurs motivations : c’est une entreprise formidable. J’ai travaillé avec eux par le passé et ils ont été plus que capables de répondre aux objectifs que nous leur avions fixés. Et je peux donc pas parler en leur nom. »
Mattia Binotto, le directeur technique de Ferrari, estime également qu’il est « très difficile et de commenter » la décision de Michelin.
« Je sais que la FIA s’occupe de l’appel d’offres. Ils le font de leur propre côté, ils ont commencé le processus, ont fixé leurs objectifs. Nous n’avons pas été impliqués. Donc, sans être impliqué, il est difficile de vraiment rendre un jugement sur ce sujet. Mais je suis d’accord avec Ben. Donc Michelin a certainement fait le choix qui leur paraissait le plus profitable. »
Aldo Costa, spécialiste de l’ingénierie chez Mercedes notamment, a replacé la problématique dans une perspective plus globale.
« C’est un sujet de discussion habituel – qu’est-ce qui est le mieux à faire pour garantir un bon spectacle, et qu’est-ce qu’il faudrait faire pour avoir la meilleure performance ? Bien sûr, du côté de la performance, au sujet des pneus plus particulièrement, la situation actuelle n’est pas la meilleure ; mais pour le spectacle, c’est la voie que nous avons suivie depuis très, très longtemps, c’est la tendance que le groupe stratégique et la communauté de la F1 ont souhaité emprunter. Donc nous devons définir les objectifs – et ça doit être fait par la structure gouvernante, ou au bout du compte par ceux qui font partie du groupe stratégique. Quant à la direction qu’il faut prendre du point de vue pneumatique – pour le bien du spectacle ou du sport – le manufacturier unique doit suivre ce qui a été décidé. »
Simone Resta, le directeur technique de Sauber, a souhaité enfin rester prudent de son côté.
« Tout ce que je peux dire, c’est que nous respectons énormément Michelin pour leur histoire, leur maîtrise technologique, et nous respectons aussi énormément leur décision. Et si leur stratégie ne répond pas aux exigences du business model de la F1, alors, j’en suis désolé, mais comme souvent, on ne peut pas réconcilier deux points de vue opposés en fin de compte. »