Il y a un an, Max Verstappen terminait sa première saison en monoplace et découvrait la Formule 1. Du haut de ses 17 printemps, le Hollandais avait suscité une foule d’interrogations dans le paddock, au point de voir le règlement modifié pour empêcher le recrutement de pilotes aussi jeunes à l’avenir.
Mais à l’issue de sa première saison en F1, les doutes qui planaient sur Verstappen se sont dissipés, au point que certains n’hésitent pas à en faire un champion du monde en devenir. L’ancien pilote Allan McNish revient aujourd’hui sur le phénomène, sans oublier un autre débutant qui n’a pas démérité, Carlos Sainz.
« Ce qui impressionne au premier abord chez Verstappen, ce sont ses manœuvres de dépassement, qui présentent des caractéristiques singulières : d’une part, elles ont toutes été serrées, mais aucune ne s’est mal terminée. Verstappen fait preuve d’une excellente perception de l’espace et il estime ainsi très bien où sont les extrémités de sa voiture et celles des ses concurrents. D’autre part, ses dépassements sont tous contrôlés et il ne bloque pas ses roues ni ne rate les virages bien qu’il soit à la limite. Il parvient très bien à savoir jusqu’à quel point il peut retarder son freinage, et c’est quelque chose que j’ai rarement vu avant. »
Des qualités à mettre néanmoins en perspective avec le seul point de comparaison disponible, son coéquipier.
« Il est impossible de juger précisément le rythme de Verstappen, parce que l’unique pilote auquel nous pouvons le comparer est Carlos Sainz, qui débute lui aussi. Mais on peut tout de même relever qu’au cours de cette première saison, Verstappen s’est qualifié 11 fois parmi les 10 premiers et qu’il a terminé dans le top 10 lors de cinq des six derniers Grands Prix. »
« À mettre à son crédit également, l’absence de hauts et de bas, qu’on s’attend à voir de la part de chaque pilote, surtout pendant leur première année. Verstappen semble avoir un mental très solide, comme quand il a refusé d’obéir à une consigne d’équipe et de laisser passer Sainz à Singapour. Ça paraît rude, mais c’est l’un des traits de caractère qui différencient les pilotes normaux de ceux qui ont quelque chose en plus. »
Mais le Hollandais n’est pas sans reproche cette saison.
« Verstappen n’a commis qu’une seule grave erreur cette année, quand il a heurté la Lotus de Romain Grosjean à Monaco. C’était une faute de jugement et une mauvaise idée de ne pas reconnaître son tort et d’essayer d’accuser Grosjean. Je suis certain que c’est en partie dû à sa confiance en lui mais également au choc, parce qu’il a été pris par surprise et que l’impact a été très violent. Ceci dit, Verstappen ne serait pas le premier pilote à rechigner à admettre ses erreurs. Michael Schumacher a construit sa carrière là-dessus. »
Si la feuille de résultats donne le Hollandais nettement vainqueur dans son duel avec Sainz, McNish tient à prendre en compte les circonstances du début d’année et tempère.
« Alors que la fin de saison approche, Verstappen a éclipsé son coéquipier, avec la 12e place et 49 points contre la 15e avec 18 points pour Sainz. L’écart est énorme, mais pas vraiment représentatif de leurs performances respectives. »
« L’Espagnol m’a toujours impressionné depuis qu’il court. Rappelons-nous qu’il avait failli passer à côté d’un baquet pour cette année, quand Verstappen avait déjà signé et que seul un transfert de Sebastian Vettel chez Ferrari avait permis de libérer le volant de Daniil Kvyat chez Toro Rosso. Et même ensuite, ce ne fut qu’après des essais tardifs qu’ils avaient embauché Sainz. En dépit de cela, il a probablement été le plus impressionnant des deux en première partie de saison, quand il a la plupart du temps devancé Verstappen en qualifications et en course. »
« La deuxième partie de l’année a sans aucun doute été moins bonne pour Sainz, mais ils sont toujours à égalité en qualifications et l’Espagnol a décroché la meilleure place qualificative de la saison pour Toro Rosso avec sa 5e position à Barcelone. »
Et selon McNish, cette baisse de forme s’explique par une malchance chronique pour Sainz, qui a toutefois livré des prestations plus qu’honorables.
« Si on fait la moyenne de l’année, Verstappen est plus rapide de 0,15 seconde au tour mais, au sein d’une équipe sujette aux problèmes de fiabilité comme Toro Rosso, je suis toujours réticent à comparer directement les données, car les faits peuvent être trop facilement déformés. »
« Sainz a ainsi subi pas moins de 7 abandons mais n’en a pas moins été impressionnant. Il suffit de regarder sa course aux Etats-Unis. Parti de la voie des stands et malgré ses gommes medium sur une piste humide mais s’asséchant où les pneus tendres étaient tout indiqués, il a quand même terminé 7e. »
« Il a également fait preuve d’une grande ténacité en Russie en prenant part à la course après un énorme choc lors des essais de la veille. C’était son premier gros accident, et ça reste toujours un test pour un pilote car il n’est pas garanti d’en sortir sans être affecté. Mais le lendemain, il est remonté à la 7e place avant de devoir abandonner sur un problème de freins. »
Si l’on peut d’ores et déjà comparer les deux coéquipiers, il serait plus sage d’attendre l’année prochaine pour se faire un avis définitif quant à leurs qualités et défauts respectifs…
« Sainz est fluide et constant et ne commet pas d’erreurs en course, alors que Verstappen s’est rendu coupable de quelques grosses bévues. D’une manière générale, Sainz n’a peut-être pas fait sensation comme Verstappen, mais ses performances ont été bien plus impressionnantes que ses résultats bruts. L’an prochain sera un grand test pour eux deux. La première année en F1, c’est un peu une lune de miel. Mais les attentes seront plus élevées l’an prochain et ce sera plus intense. »