Les essais hivernaux se déroulent en temps normal en Espagne, sur les circuits de Barcelone ou de Jerez. Mais même en pleine péninsule ibérique, les températures à cette période de l’année ne sont pas représentatives des fortes chaleurs rencontrées plus tard par les écuries. L’hiver prochain encore, malgré les grands changements de réglementation attendus, le monde de la F1 ne change pas ses habitudes.
Paul Hembery, le directeur de la compétition chez Pirelli, rappelle toutefois que le manufacturier italien dispose d’une batterie de tests supplémentaires cette année pour développer ses pneus extra-larges. « La bonne nouvelle, c’est que nous avons un programme de tests. Après avoir averti tout le monde, nous avons commencé un programme de 24 jours de tests, réparti équitablement entre Red Bull, Ferrari et Mercedes, qui nous ont aimablement soutenu en développant une version 2015 de leur voiture avec un package aérodynamique construit pour simuler les effets de la réglementation de 2017. C’est bien sûr un grand pas en avant. »
Avec plus d’appui et des monoplaces bien plus véloces, Pirelli est confronté à un défi de choix : « L’appui augmente de manière substantielle », explique Hembery pour ESPN. « Les exigences de performance sont d’améliorer les temps au tour de cinq secondes par rapport à 2015. En réalité, en ayant déjà vu une amélioration de deux secondes cette saison, il est probable que nous nous améliorerons substantiellement. (…) Le changement est vaste. Il inclut l’augmentation de la largeur des pneus arrière et avant respectivement par 6 et 8 centimètres, ce qui semble bon. »
Esthétiquement, confirme Hembery, les voitures auront l’air « très spectaculaires ». L’aspect sportif n’est bien sûr pas oublié : « Le but est de rendre les dépassements plus faciles pour les équipes ; si deux voitures se suivent, nous voulons nous assurer que les pneus n’atteindront pas un pic de température, qui a freiné certaines tentatives de dépassement en certaines occasions. Bien sûr, cela fonctionnera uniquement si nous réduisons aussi l’impact du poids de l’aéro d’une voiture à l’autre. »
24 jours d’essai au total, cela fait beaucoup pour une F1 qui traverse une prétendue période d’austérité budgétaire. Ces journées sont néanmoins indispensables pour Pirelli, notamment pour la chaleur : "Nous avons procédé à des tests à Fiorano et au Mugello au début du mois d’août, alors que les températures étaient très, très chaudes". Pour faire "correctement son travail", Hembery a en effet besoin de se rendre sur un circuit représentatif "des conditions que vous allez rencontrer en course. Du point de vue du manufacturier, il serait préférable d’être dans un endroit chaud pendant l’hiver. Ces dernières années, nous avons été à Bahrein [en 2014], ce qui nous a permis d’avoir une claire indication des performances des pneus à une époque de l’année bien moins avancée."
"Je comprends que les équipes pensent que cela coûte de l’argent, mais encore une fois, c’est un sport qui brasse plusieurs milliards. S’il y a la volonté pour, je suis sûr que les fonds peuvent être trouvés." Paul Hembery affirme donc espérer que la F1 décide d’aller à Bahrein "le plus tôt possible". Une nouvelle session à Bahrein serait "une grande étape de franchie", plaide l’ingénieur britannique. "Cela ne devrait pas nous affecter pour l’Australie, mais cela signifie que nous pouvons commencer à travailler plus tôt s’il y a besoin de changements."
Si les équipes ne se rendent toutefois pas au Moyen-Orient, Pirelli se repliera sur son "travail de simulation" interne. "Vous y faites la majorité du travail, mais l’interaction entre la voiture, les pneus et le tarmac, requiert toujours des tests à l’extérieur. (...) Nous devons avoir une bonne compréhension du fonctionnement des pneus, comprendre si nous avons le bon niveau de dégradation, ou s’il est trop faible ou trop élevé. Les équipes demandent toujours une stratégie à deux arrêts, ce qui deviendra plus dur avec moins de dégradation – pourquoi changer vos pneus ?".
La saison prochaine, la dégradation des pneus devrait en effet être moins prononcée pour laisser le loisir aux pilotes d’attaquer en piste.