L’aérodynamicien en chef de Red Bull Racing, Peter Prodromou, est certainement le mieux placé pour nous parler du rôle de l’aérodynamique dans les F1 modernes. Le bras droit d’Adrian Newey aide à la conception des voitures les plus efficaces sur ce plan depuis plus de 4 ans.
Peter, les règlements en matière d’aérodynamique ont énormément changé ces cinq dernières années. Aimes-tu ce genre de changements ou les trouves-tu frustrants ?
En général, les règlements deviennent davantage restrictifs en changeant. Cela entraine une certaine dose de frustration. Mais ces changements vous permettent également de surpasser vos adversaires, car ils constituent une nouvelle opportunité.
Actuellement, les dépenses des écuries de F1 sont très surveillées. Par exemple, le nombre d’heures passées dans les souffleries et les puissances des traitements informatiques sont limitées. Cela rend-il ton travail plus difficile ?
Je ne pense pas que mon travail soit devenu plus difficile. Nous sommes très flexibles et nous réussissons à nous adapter à toute nouvelle contrainte. Nous avons dépensé énormément d’énergie dans notre programme de soufflerie, afin de le rendre plus efficace. Nous avons probablement augmenté notre charge de travail, et ce, en très peu de temps. Nous travaillons plus, pour un résultat plus important.
Aujourd’hui, quel degré de sophistication a atteint la simulation ? Existe-t-il des parties de ce travail en laboratoire qui ne se concrétisent pas sur piste ?
L’aérodynamique est une science exacte, mais le plus difficile est de comprendre la science. En F1, la révolution en matière d’aérodynamique a démarré il y a seulement 25 ans et nos capacités de simulation sont toujours en pleine évolution, que ce soit avec les souffleries ou les ordinateurs. Il y a toujours une part de doute qui accompagne nos essais sur piste. Cette situation n’est pas due à un éventuel caractère inexact de la science de l’aérodynamique, mais plutôt à un manque de jugeote de notre part ou à un retard dans l’évolution de nos outils.
Dans quel état te trouves-tu avant que la nouvelle voiture n’effectue les premiers essais d’avant-saison ?
Je suis à la fois excité et anxieux ! J’ai toujours peur d’avoir commis une erreur. À la fin du premier jour, tu éprouves un sentiment incroyable lorsque toutes les données collectées indiquent que la voiture évolue comme prévu. Les pilotes permettent également de savoir si tout va bien. En seulement quelques tours, ils sont capables de te dire si la voiture a l’air bonne ou pas.
Les concepteurs possèdent-ils un modèle de voiture préféré ?
J’en ai plusieurs ! La McLaren 1991 revêt un caractère spécial pour moi. Il s’agissait de ma première année chez McLaren, donc je n’ai pas beaucoup participé à son élaboration. Ceci étant, c’est l’année où Ayrton Senna a remporté son dernier titre de champion. Ici, chez Red Bull Racing, j’ai dû mal à faire mon choix parmi les cinq dernières voitures. Le modèle 2009 sort néanmoins du lot, car il s’agissait de la première voiture capable de se mêler à la lutte pour les premières places et c’est ce qui le rend spécial.
Existe-t-il un domaine en particulier sur lequel l’accent a été mis cette année ? Travaillez-vous sur la RB9 ou sur la prochaine voiture ?
Un peu des deux. C’est un gros défi, mais nous sommes désormais davantage capables de mener deux programmes à la fois, notamment par rapport à la période entre 2008 et 2009, qui correspond au dernier changement de règlement notable. À cette époque, nous n’avions tout simplement pas les moyens de le faire. Mais il est apparu évident que l’on devait mener deux programmes de front pour rester compétitifs. Nous arrêterons bientôt de travailler sur la RB9, pour nous pencher uniquement sur la RB10.
Les prochains changements prévus en 2013 et 2014 constitueront-ils un défi plus important qu’entre 2008 et 2009 ?
Oui. Cela changera tout. Nous devrons revoir le packaging du nouveau moteur et le reste de l’aérodynamique sera également entièrement différent. Ce sont des changements très importants. Cela va être passionnant.
Source : Red Bull Racing