Membre du triumvirat de Liberty Media dirigeant désormais la Formule 1, Ross Brawn est chargé plus précisément d’entretenir des bonnes relations entre les propriétaires américains et les écuries de F1. L’ancien ingénieur de Ferrari entend aussi réfléchir à l’évolution des week-ends de Grands Prix, et il ne compte pas rester inactif, loin de là. L’ère de « l’inertie » approche de la fin selon lui.
« Il y a eu pas mal d’inertie en F1, donc il va être difficile de tout faire absolument bien, mais je pense que nous pouvons grandement nous en approcher. Ce ne sera pas parfait, mais j’espère que nous pourrons progresser dans la bonne direction » confie-t-il à Barcelone.
Pendant que Sean Bratches permet aux écuries et aux pilotes de davantage utiliser leurs contenus sur les réseaux sociaux, Ross Brawn pourrait s’atteler à une réforme plus ambitieuse pour attirer de nouveaux fans : bouleverser le schéma bien établi des week-ends de Grands Prix. Bernie Ecclestone, avant son départ précipité, était un partisan de l’organisation de deux courses par week-end – deux courses « sprint ». Quelle est l’opinion de Ross Brawn sur ce sujet épineux ?
« Je suis un peu nerveux. Quand nous changeons le format, nous devons être vraiment sûrs d’avoir raison. Mon rêve, c’est d’avoir une course hors-championnat, une fois par an, pour que nous puissions essayer un format différent lors de cette course. Une course hors-championnat nous permettrait de varier le format et d’essayer quelque chose de différent, de le faire évoluer. Vous ne pouvez prendre le risque de changer le format dans une course comptant pour le championnat, et ne pas avoir raison (précisions à venir sur cette idée dans un autre article, NDLR). »
Ross Brawn veut donc avancer sans révolution mais avec précaution. Telle sera aussi sa philosophie pour tout changement de règlement sportif. L’ingénieur prend l’exemple du récent changement de réglementation : loin de son objectif initial, qui était de bouleverser la hiérarchie, il pourrait au contraire renforcer la domination des écuries de pointe…
« Nous nous exposons nous-mêmes à chaque fois que nous procédons à des changements comme celui-ci. Croisons les doigts : le règlement va fonctionner, mais je pense que c’est un bon exemple d’une décision qui n’a pas adopté les bons principes au départ. Si ce principe était d’arrêter la domination de Mercedes, vous auriez pu aussi trouver des arguments prouvant l’inverse… Une équipe qui est forte, qui a toutes ces ressources, adorera le changement. C’était naïf de penser que ce changement déstabiliserait Mercedes, cela les a avantagés. »
Un autre chantier de Ross Brawn est de se préoccuper des petites écuries, en difficulté financière actuellement, comme l’a encore tristement prouvé la faillite de Manor pendant l’hiver…
« Sur le long terme, nous devons nous assurer que plus d’équipes aient la capacité d’être compétitives. A l’arrière de la grille, l’apport financier d’un pilote compte beaucoup plus qu’à l’avant de la grille. Si nous pouvons mettre les équipes plus petites sur des bases plus saines, alors je pense que tout le sport s’améliorera, et vous aurez plus de Verstappen qui viendront. »
« Pour être honnête, mon objectif, depuis trente ans, n’a pas été d’avoir une compétition serrée, mon objectif était d’être compétitif au point que personne ne puisse me battre. Je suis le braconnier devenu garde-forestier à présent, parce que ma priorité est de resserrer les écarts ! Mais nous ne devons pas le faire artificiellement, et nous ne devons pas pénaliser une équipe parce qu’elle fait un travail exceptionnel. »
Mercedes peut donc dormir sur ses deux oreilles pour le moment : Ross Brawn veut bien mettre fin à la domination outrageante de la firme à l’étoile, mais pas au point de briser les règles de l’équité…
« Quelqu’un a suggéré que si une équipe gagnait, alors elle ne devrait pas avoir le droit de développer sa voiture jusqu’à ce que les autres la rattrapent. Les fans ne s’y tromperont pas. Ils deviendront désenchantés. »