Ruth Buscombe est l’un des très beaux exemples de la réussite féminine en Formule 1, aux côtés notamment de Claire Williams ou Monisha Kaltenborn, sa directrice. En effet, Buscombe est responsable de la stratégie chez Sauber et a notamment été à l’origine de la stratégie de Wehrlein dimanche à Barcelone, ce qui a permis à l’Allemand de marquer quatre points précieux pour son équipe.
Kaltenborn a d’ailleurs mis en avant « une parfaite stratégie derrière ce résultat », accréditant au passage la Britannique. Dans un sport traditionnellement masculin, l’ingénieure a fait sa place en passant d’abord chez Ferrari et Haas mais a aussi rencontré son lot d’adversité, notamment avant l’accession à la F1.
« La route a été difficile » explique-t-elle au Guardian. « J’ai eu un accident de voiture à 18 ans et j’ai failli perdre la vie, ce qui a tout rendu un peu plus fragile. Ma courbe de progression a été raide depuis 10 ans et je ne pensais pas y arriver avant d’être à ce niveau ».
Malgré la misogynie qui peut parfois transpirer dans les sports mécaniques, Buscombe avoue ne jamais avoir eu de problèmes avec les pilotes qui passent facilement au-delà du genre et se concentrent sur le travail à effectuer : « Je n’ai aucun problème avec les pilotes car ils veulent tous faire de leur mieux. J’ai eu une bonne relation avec tous les pilotes avec qui j’ai travaillé, ils étaient très réactifs. C’est un environnement tellement compétitif que ça ne leur change rien que ce soit une femme ou un rongeur qui leur parle ».
« Je suis passée de la volonté d’être une princesse à celle d’être une astronaute, puis finalement être en F1. Je jouais à tous les jeux de F1 et je remarquais bien que les personnages étaient des hommes. A l’école, des professeurs essayaient de me dissuader de faire des études d’ingénieur, pas parce que je n’étais pas douée mais parce qu’ils se demandaient si je voulais vraiment faire cela, et il faut que ça change ».
« Quand les filles grandissent, elles ont vite une image qui leur dit ce que font les hommes et ce que font les femmes, et à moins d’être têtue comme je l’étais, une personne un peu hésitante se fera convaincre par les professeurs et les médias que ce genre de carrière est pour les hommes ».
Ce qui n’a pas été son cas puisqu’elle est d’abord passée chez Ferrari dans le département du développement stratégique avant d’être appointée stratégiste de course chez Haas où elle avait notamment participé à la stratégie qui avait offert la sixième place à Romain Grosjean pour la première course de l’équipe américaine. Ces performances ont convaincu Sauber de lui offrir un rôle de responsable de la stratégie.
« J’ai été obligée de prouver ma valeur face à certaines personnes avec qui j’ai travaillé et à chaque fois, c’était le même défi qu’une course. Il faut avoir confiance en soi, chaque difficulté m’a rendue plus forte, a renforcé ma motivation et m’a permis d’être plus performante » poursuit-elle. « J’appelle ça le syndrome « prouve-le encore », il faut toujours plus prouver sa valeur et sa légitimité que si on était un homme ».
La jeune femme reconnaît également avoir été inspirée par sa responsable actuelle, Monisha Kaltenborn, lorsqu’elle était à l’université : « Nous avons une femme comme directrice chez Sauber, et ça donne le ton pour toute l’équipe. Personne chez nous ne se soucie de savoir s’ils s’adressent à une femme ou un homme, nous cherchons juste à travailler en équipe et signer de meilleurs résultats ».
« Le monde de la F1 change et avoir des femmes comme Monisha et Claire Williams signifie que lorsque les gens allument leur télé, ils ne voient plus uniquement des hommes blancs d’âge moyen, et c’est fantastique, puisque nous avons aussi un triple champion du monde noir. La F1 change plus lentement que ce que nous aurions voulu mais elle doit évoluer. Nous devrions avoir les meilleures personnes et ne pas faire cas de la couleur ou du genre, simplement du talent ».