Andrew Shovlin est ingénieur de course chez Mercedes et est dans l’équipe de Brackley depuis l’époque où elle s’appelait BAR. De Panis à Schumacher en passant par Button, le Britannique a vu défiler un certain nombre de pilotes et il admet qu’au début, la collaboration n’est jamais facile car il faut du temps à l’ingénieur avant de comprendre ce qu’attend le pilote comme informations de sa part. "C’est difficile à comprendre. Vous pouvez vous asseoir, vous pouvez en discuter, vous pouvez passer des jours à faire ça, mais vous ne comprenez ce qu’ils veulent savoir et ce qu’ils ne veulent pas savoir que quand vous arrivez enfin au week-end de course."
Ainsi, il faut trouver les bons moments pour communiquer avec son pilote, et il va de soi que cela ne peut jamais être au moment d’aborder un virage. En revanche, les lignes droites sont de bonnes occasions de parler à la radio. "Les pilotes s’en fichent si vous leur parlez dans les lignes droites, et je n’ai jamais connu un pilote qui avait un problème avec ça. Si vous commencez de leur parler dans le virage, ça ne doit pas être dans la zone de freinage, quand ils essaient de trouver leur point de freinage avec un ou deux mètres de précision. Si quelqu’un les interrompt, ça peut leur faire louper le point de freinage."
Concernant les informations à donner au pilote, Shovlin explique que cela varie selon le pilote. "Certains pilotes veulent juste savoir ce qu’il se passe autour d’eux. Il ne s’agit pas que de la course qu’ils voient, mais aussi de celle qu’ils ne peuvent pas voir derrière eux." Michael Schumacher était par exemple très friand d’informations. "Quand nous avions Michael Schumacher, il voulait tout savoir. Vous ne pouviez presque pas lui donner assez d’informations."
"Lewis et Nico sont un peu plus normaux, concernant ce qu’ils veulent entendre. Quand ils entament un tour, ils veulent savoir si la pression des pneus est dans la bonne fenêtre, et au milieu du tour de sortie des stands, ils veulent savoir si les pneus sont encore un peu froids, parce qu’ils peuvent encore faire quelque chose pour ça. Ils ne veulent pas avoir cette information juste avant de freiner au premier virage, où ils ne peuvent plus rien faire", continue le Britannique.
L’ingénieur de chez Mercedes donne quelques exemples concrets. "Il y a des choses qu’ils veulent savoir : qui d’autre est rapide, où ils peuvent trouver du temps, ce que fait leur coéquipier. Il y a quelques années, on faisait tout ce travail dans le garage. Si on voit qu’un pilote essaie quelque chose de nouveau, on va l’analyser, voir ce qui est le mieux et passer l’information à l’autre pilote pour qu’il essaie de voir si cela améliore les choses."
Andrew Shovlin comprend que certains pilotes n’aiment pas être dérangés pendant qu’ils conduisent, mais il précise qu’aujourd’hui, la communication est primordiale. "Le problème aujourd’hui c’est qu’on ne peut pas laisser les pilotes dans le silence et ne jamais les interrompre parce qu’il y a des choses clés qu’ils doivent comprendre. Il y a les niveaux de charge du KERS, pour s’assurer que les batteries ne se vident pas parce que ça change l’équilibre de la voiture, et vous devez gérer l’essence."
Mais attention, un moment est sacré, un moment lors duquel il ne faut sous aucun prétexte déranger un pilote : pendant un tour de qualifications. "Je n’ai jamais connu de pilote qui soit heureux d’avoir des informations lors d’un tour de qualification. Donc vous devez tout préparer et vous devez vous assurer de leur avoir donné toutes les informations dont ils ont besoin avant le tour. Après vous les laissez tranquilles et ils font ce qu’ils ont à faire."