A la fin de la saison, Williams va perdre trois sources de revenus importantes : le « cash-prize » de la FIA, puisque l’écurie va finir 9e ou plus probablement 10e au classement des constructeurs ; les apports financiers de Lawrence Stroll ; et le sponsoring de Martini, qui a décidé de passer à autre chose.
Claire Williams veut prendre le temps nécessaire pour rebâtir Williams… mais la situation n’est-elle pas plus urgente à Grove ?
« Je ne serais pas en train de sourire si nous n’avions pas le temps nécessaire devant nous » assure la fille de Frank. « Nous sommes dans une bonne situation financière. Bien sûr, nous voudrions toujours avoir plus d’argent. Les ingénieurs dépensent juste ce que vous leur donnez. Mais nous ne luttons pas pour notre survie. »
« Nous avons un bon budget. Il y a beaucoup de pertes financières à prévoir pour nous l’an prochain, mais chez Williams, nous avons traversé des situations beaucoup plus difficiles. Je me rappelle, le soir, chez nous, maman demandait : ‘Frank, que diable va-t-on faire l’an prochain ?’. Et mon père répondait : ‘Ne t’inquiète, quelque chose va arriver…’. Et j’ai cette approche. Parce que quelque chose finit toujours par arriver. »
« Je crois que nous serons en bonne forme l’an prochain. Je sais déjà que nous aurons bel et bien un budget sain, ce sera OK l’an prochain. Nous sommes déçus de voir Martini nous quitter, mais nous avons passé cinq années formidables ensemble et nous leur sommes reconnaissants pour cela. C’est la fin naturelle de notre partenariat avec eux. Cela n’a rien à voir avec notre performance. Mais il nous faut travailler dur pour remplacer Martini – même si des opportunités se présentent. »
Si Williams a un budget sain, c’est aussi parce que des pilotes payants – Lance Stroll et Sergey Sirotkin – ont été recrutés par l’écurie. Mais sur le plan sportif, Williams n’a-t-elle manqué de marquer trop de points en raison de l’inexpérience de ces jeunes pilotes fortunés ?
« Nous ne leur avons pas donné l’équipement cette année pour se battre pour des points » récuse Paddy Lowe, le directeur technique. « Mais malgré cela, ils sont restés disciplinés, engagés dans l’équipe, et ils ont continué à travailler dur. Est-ce que leur inexpérience a été un problème pour nous ? Je dirais que notre voiture est le problème principal. La responsabilité de nos pilotes n’est en aucun cas engagée. »
« Nous avons développé une voiture, en adoptant une approche agressive, mais cette approche n’a pas fonctionné. Au contraire, cela nous a fait faire un pas en arrière. C’est décevant. »
Malgré ce constat alarmiste, Paddy Lowe n’a pas abandonné tout espoir de voir revenir Williams sur le peloton… du moins en 2019.
« Cette année, si vous regardez les chronos depuis Melbourne, nous n’avons pas cédé du terrain par rapport à nos concurrents. Nous n’allons pas abandonner, mais si nous sommes réalistes, l’idée de revenir sur le milieu de grille à ce moment de la saison… non, cela ne va peut-être pas arriver. Donc naturellement, nous sommes beaucoup plus concentrés sur l’an prochain. »
Pour assurer tant la compétitivité de Williams que l’avenir financier de l’écurie, une solution serait de faire comme Haas ou Sauber-Alfa Romeo : s’associer avec un grand constructeur pour partager des pièces comme des sponsors. Williams est-elle prête à renoncer à son modèle 100 % indépendant ? Est-ce que l’option de revenir au modèle Williams-BMW, comme entre 2000 et 2005, est une piste envisagée par Claire Williams ?
« Au début, je pensais que nous pourrions y arriver en restant indépendants. Maintenant, avec la F1 telle qu’elle l’est aujourd’hui, être une équipe d’usine serait hautement appréciable pour nous. Je ne pense pas que nous en avons besoin pour être 4e au classement des constructeurs. Nous pouvons y arriver par nous-mêmes. Mais pour progresser encore… ça nous ferait passer une autre étape. »
« Nous gardons nos yeux ouverts » surenchérit Paddy Lowe. « Il faut regarder ce qu’il se passe autour de vous. La F1 change. Nous avons vu de plus en plus d’écuries acheter des boîtes de vitesses ailleurs. Nous, nous construisons la nôtre. Mais il faut trouver la meilleure solution pour la performance de l’équipe. Cela dit, Williams a une forte culture d’indépendance, de constructeur indépendant. »
Il faut aussi qu’un grand constructeur se porte candidat pour un partenariat avec Williams, ce qui est encore loin d’être acquis…