La mort d’Ayrton Senna a privé la Formule 1 d’un duel qui s’était lancé entre le Brésilien et Michael Schumacher. Mais si l’Allemand s’est retrouvé favori pour le titre face à Damon Hill après cet épisode tragique, il a connu une période difficile sur le plan mental.
Lorsque la course a repris à Imola après l’accident de Senna, Schumacher était convaincu que son rival n’était pas blessé lourdement, comme on l’entend l’expliquer, dans une interview d’époque, dans le documentaire ’Schumacher’.
"On pouvait envisager qu’il s’était blessé au bras, ou qu’il s’était cassé une jambe, mais on n’imaginait rien d’autre. On a repris, parce que c’était ce qu’il fallait faire, la course devait se dérouler" déclare Schumacher, enregistré quelques mois après les faits.
Flavio Briatore, qui était le directeur de Benetton, se rappelle avoir expliqué à son pilote que la situation était grave et que Senna était dans le coma au moment de monter sur le podium, et lui avoir dit de faire un podium dans le calme.
"Je suis allé voir Michael après la course et je lui ai dit ’pas de champagne’, il m’a demandé comment allait Ayrton et je lui ai dit ’mal’. C’est la première fois que je voyais une autre facette de Michael" se souvient Briatore.
Schumacher a ensuite passé les heures suivantes à recevoir différentes informations au sujet de son rival. L’évocation du mot coma ne lui semblait pas si grave, ou du moins pas insurmontable pour le Brésilien, et il a connu une sorte de déni face à la situation.
"On est montés sur le podium, Flavio nous a dit ’il est dans le coma’. Mais le coma peut être beaucoup de choses, ça pourrait aller mieux ou ça pourrait être très grave. On ne croit pas forcément que la situation puisse être grave."
"Deux heures après la course, Tom Walkinshaw est venu me voir et m’a dit ’c’est très grave’, je lui ai dit ’non, il est dans le coma, ça ne veut pas dire que c’est trop grave’. Il m’a dit ’non, ça ne semble pas bon’."
"Quelqu’un est ensuite venu me voir et m’a dit ’il est mort’, et la minute suivante quelqu’un est venu me dire qu’il était dans le coma. On avait tellement peu d’informations à ce moment-là qu’on ne savait pas quoi penser."
"Et je ne pouvais pas croire qu’il était mort, je refusais d’y penser à ce moment-là. Je me disais qu’il allait être champion, peut-être manquer une ou deux courses, mais qu’il allait revenir."
Le septuple champion du monde, qui courait alors après sa première couronne, a eu du mal à assimiler la terrible réalité : "Mais le pire, ça a été les deux semaines suivantes, durant lesquelles j’ai vraiment dû accepter qu’il était mort. C’était quelque chose de fou."
La réalité de la mort en F1 a frappé Schumacher
Malgré l’image de tête brûlée qu’a parfois Schumacher auprès du public, l’Allemand expliquait à l’époque qu’il a envisagé que la peur puisse prendre le dessus. La réalité de la mort en Formule 1 l’a frappé de manière inattendue et plutôt violente.
"Je suis arrivé à Silverstone, et j’ai vu tout à coup les choses différemment. J’ai fait le tour du circuit de Silverstone avec une voiture de route et je pensais ’c’est un endroit où tu pourrais mourir’, ’tu pourrais mourir ici’."
"C’était fou, je me suis dit que je faisais toujours des tests et des courses ici, mais il y avait énormément d’endroits où je pouvais me tuer, et je n’arrivais pas à penser à autre chose. Je ne savais pas comment j’allais gérer cette situation lorsque j’allais être dans une voiture de course."
"Je ne savais pas si j’allais pouvoir piloter sans penser constamment que ça allait mal se passer si je sortais de piste à tel endroit. C’était quelque chose de très étrange. Je me réveillais la nuit, je dormais trois heures par nuit."
Le documentaire ’Schumacher’ sera disponible sur Netflix la semaine prochaine, le 15 septembre.