La carrière de Fernando Alonso est l’une des plus commentées, car le sentiment de déception revient souvent dans l’analyse faite à son sujet, malgré deux titres mondiaux en F1 pour l’Espagnol. Après une période réussie chez Renault, ses échecs successifs chez McLaren et Ferrari - où il a quand même joué le titre deux fois - ont eu de quoi décevoir.
Par la suite, son passage chez McLaren pendant quatre difficiles années (photo), qui a débouché sur une retraite par la petite porte, est vu comme un échec. Mais maintenant qu’il est de retour au plus haut niveau chez Aston Martin F1, il semble pouvoir jouer des victoires et espère viser un troisième titre.
Selon Eddie Jordan, fondateur de l’équipe éponyme, Alonso a trop cherché à privilégier sa situation pécuniaire pendant une partie de sa carrière, alors que d’autres équipes auraient pu lui apporter ce qu’il cherchait sportivement.
"Il ne faut jamais regarder en arrière. Il doit se poser la question et demander à Flavio, son manager Flavio Briatore et moi sommes toujours de bons amis, mais vous devez vous rappeler que Fernando Alonso a couru après l’argent" déplore Jordan.
"Il est allé dans des équipes où il recevait plus d’argent qu’il n’en aurait reçu dans une autre équipe qui avait probablement plus de chances qu’il remporte le titre mondial. Il le regrette probablement aujourd’hui parce qu’il a beaucoup d’argent."
"Parfois, avec le recul, on se dit que c’était une erreur. Et si je devais parler à Fernando, s’il était assis en face de moi, je lui dirais ’Fernando, tu as fait une erreur’. Tu as encore un grand héritage, tu as été deux fois champion du monde. Mais au fond de toi, tu sais que ça aurait pu être facilement cinq ou six."
La "colère" comme clé de la réussite
Selon David Coulthard, la frustration de ces années d’échec sont ce qui font qu’Alonso est encore au sommet de son art. Selon l’Ecossais, c’est souvent la motivation qui fait défaut à un pilote quand il vieillit, et c’est pour cela que ce problème ne touche pas le double champion du monde.
"Je pense que Fernando est si fort parce qu’il est en colère. Il est en colère parce qu’il n’a remporté que deux championnats du monde, et c’est cette colère qui le pousse à en avoir encore besoin. C’est la clé du succès. On ne perd pas la vitesse, on perd le besoin. Il en a toujours besoin" note Coulthard.
Et ce dernier ne s’étonne pas de son retour réussi, puisqu’Alonso n’a jamais arrêté de courir : "Quand Alonso s’est éloigné de la Formule 1 la première fois, il s’est directement lancé dans les voitures de sport, l’IndyCar, il a fait le Dakar, il a une piste de karting et on le voit tester ses karts dans ses installations en Espagne.
"Le fait d’être en permanence dans la peau d’un pilote de course et toutes les choses qui en découlent vous permettent de garder l’esprit vif. Il y a cette expression, ’ne laissez pas entrer le vieil homme’. Si vous laissez entrer le vieil homme ou la vieille femme, c’est ce que vous finirez par devenir."
"Mais si vous luttez contre cela et que vous gardez un esprit jeune aussi longtemps que la nature le permet. Je pense qu’en comparaison avec Michael, qui s’est arrêté et n’a plus couru, qui est ensuite allé faire de la moto, a eu un accident et s’est cassé une vertèbre, et qui est ensuite revenu en F1 trois ans après avoir arrêté, il pouvait encore faire ce qu’il avait à faire."
"Il était toujours un individu incroyable, mais il n’était tout simplement pas aussi bon qu’il l’avait été avant d’atteindre la quarantaine et l’horloge s’était mise à tourner. Je pense donc que cela dépend la nature ininterrompue du temps que Fernando a passé loin de la F1, comme nous l’avons vu avec Kimi Räikkönen qui est parti en rallye."
Hill pense qu’Alonso a prouvé son "potentiel"
Damon Hill rappelle qu’Alonso a devant lui une chance unique, celle de rappeler quel est son niveau avant de quitter définitivement la F1. Alors que sa réputation était émoussée en 2018, il se reconstruit une image de pilote capable de gagner, même s’il n’y parvient pas.
"Je pense qu’il peut partir sur une bonne note. S’il ne remporte pas un autre titre, je pense qu’il peut partir en disant ’c’était mon potentiel, tout le monde sait quel était mon potentiel, mais il n’a pas été réalisé’. Je pense qu’il l’a déjà admis par le passé" assure Hill.
"Il reconnaît que c’est la façon dont il a fait les choses. Nous avons déjà eu l’occasion de parler de lui comme s’il était sur le point de prendre sa retraite, mais il pourrait continuer à jouer jusqu’à ce qu’il ait largement dépassé les 45 ans."
Le champion du monde 1996 pense que le comportement d’Alonso, élogieux au sujet d’Aston Martin F1, est fait pour éviter les déboires passés, qui l’ont parfois vu attaquer publiquement ses équipes et s’y retrouver esseulé.
"Il est le fils prodigue, n’est-ce pas ? Il a surjoué lorsqu’il était chez McLaren, puis il a fait quelque chose de similaire chez Ferrari, et enfin il a insulté Honda en le traitant de ’moteur de GP2’ et il a perdu beaucoup d’amis."
"Je pense qu’il a eu une révélation ! Il a fait volte-face et s’est dit : ’Écoutez, je comprends que j’ai contrarié des gens. Cela a nui à ma carrière, je n’ai que deux championnats du monde alors que j’aurais dû en avoir quatre ou cinq’" conclut Hill.