Nicholas Latifi n’est pas le premier infortuné pilote du peloton à se retrouver au centre des événements, voire d’une polémique, pour l’attribution d’un titre mondial en F1 lors de l’ultime course. Avant lui, il y a eu aussi des « Latifi bis » et qui ont dû hélas subir également, railleries, quolibets, voire pire…
2012, Bruno Senna : Le neveu se prend le tapis dans les pas de l’oncle
« Quoi ? Après Auguste, Augustule ! Quoi après que nous avons eu Napoléon le Grand, il faut que nous ayons Napoléon le Petit ? ». Tel fut le surnom dont Victor Hugo affubla le traître du 2 décembre, marquant ainsi les esprits par un sobriquet qui resterait dans les mémoires. Toutes proportions gardées, il y eut aussi en F1, dans la famille Senna, le "petit" neveu, à savoir Bruno, et le "grand" oncle, Ayrton.
Senna le Petit donc, on l’aura presque oublié aujourd’hui, a eu une brève carrière en F1, finissant chez Lotus puis chez Williams, en 2012. Il ne brilla pas particulièrement cette année, sans être lamentable non plus – et marqua 31 points contre 45 pour son coéquipier Pastor Maldonado, qui bien sûr recueillit une formidable victoire à Barcelone 2012.
Ironiquement, Bruno Senna fut peut-être le plus visible en cette saison 2012 lors du dernier Grand Prix à Interlagos – double ironie car il s’agit bien sûr du circuit Senna.
Fernando Alonso pouvait alors espérer le titre en ce dernier Grand Prix, pointant à 13 points de la Red Bull de Sebastian Vettel. L’Espagnol de Ferrari, après un premier tour brillant, était déjà dans la roue des premiers, bien aidé par son coéquipier Felipe Massa pour dépasser Mark Webber.
Sebastian Vettel, qui ne devait qu’assurer des petits points, se contenta d’être conservateur : parti de manière très molle, prudente, le pilote Red Bull, qui s’élançait pourtant devant son rival de Ferrari, se retrouva vite englué dans le peloton… alors qu’il était déjà deux places derrière Fernando Alonso, il croisa la route de Bruno Senna qui, parti 12e, avait pris lui un très bon départ.
Ce fut alors le choc : la Williams de Senna envoya Vettel en tête-à-queue au virage 4. Le Brésilien était à blâmer : enthousiasmé par son départ, il avait voulu freiner très, très tard, pour dépasser notamment la Force India de Paul di Resta (qui se crasherait en toute fin de course) et la Lotus de Kimi Räikkönen, à l’intérieur. Sebastian Vettel n’avait aucune raison de voir Senna arriver à cet instant.
Pourtant Senna, vite accusé d’avoir failli fausser la lutte pour le titre, se défendit après course, fustigant plutôt la Red Bull de Sebastian Vettel : « Quand vous êtes en milieu de peloton, vous devez faire un peu plus attention à la façon dont vous prenez les virages. Je contrôlais parfaitement la situation, tout était parfait pour prendre ce virage et il m’a frappé très, très fort en venant de l’extérieur. »
« C’était un très bon départ et j’avais dépassé di Resta au virage 4. Malheureusement, Sebastian était à l’extérieur et a plongé à l’intérieur, et ne m’a évidemment pas vu et m’a heurté assez fort ; je suis parti en tête à queue et j’ai été heurté par [Sergio] Perez. Ce n’est pas la fin du Grand Prix du Brésil que je voulais, mais parfois c’est ce qu’il se passe lors des courses. »
Vettel doublement miraculé
Résultat des courses, la Williams fut hors-course avec une suspension éclatée.
Et Sebastian Vettel ? En tête-à-queue, voyant arriver tous ses poursuivants, de face, l’Allemand dut vivre ses plus longues secondes en carrière. Double miracle alors qui se produisit : d’une part aucune autre voiture ne vint heurter la Red Bull ; d’autre part, malgré une carrosserie endommagée (« Il y a des dégâts » lui souffla son ingénieur de piste) et un échappement mal en point, le pilote Red Bull put continuer la course.
Avec un rythme saisissant, il remonta de manière éclatante sur le reste du peloton, pour assurer une 6e place largement suffisante pour être titré, dépassant notamment facilement un Michael Schumacher qui lui passait le flambeau.
Sans nul doute, il s’en est fallu de très peu pour que Fernando Alonso remporta un troisième titre mondial, avec Ferrari. Le troisième titre de Sebastian Vettel était pour sa part peut-être plus encore miraculeux que celui de 2010, tant tout aurait pu se finir au virage 4 d’Interlagos. Cette fois-ci, il n’y eut pas de Petrov pour l’aider, mais simplement la chance du vainqueur...