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Comment un système anti-calage changea l’avenir de Frentzen et de Jordan en F1…

La véritable raison de son abandon au GP d’Europe 1999 révélée

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Le Grand Prix d’Europe 1999, au Nürburgring, que la F1 a récemment rediffusé (à voir en intégralité ici sur Youtube), reste encore aujourd’hui dans les mémoires pour son déroulement rocambolesque.

Sous une forte pluie et après une série d’abandons, le podium final avait été inattendu : Herbert (Stewart), Trulli (Prost GP), Barrichello (Stewart). Il s’agissait de l’antépénultième Grand Prix d’une saison serrée, et chaque point valait ainsi double avant les deux dernières courses de l’année…

Heinz-Harald Frentzen, après deux victoires, était alors en course pour un incroyable titre avec Jordan, luttant avec Eddie Irvine et Mika Hakkinen. Cependant, il fut une des victimes de ce Grand Prix – auteur de la pole, il ne vit finalement pas l’arrivée.

A l’époque, un motif lié à un « problème électrique » avait été avancé. En réalité, comme l’a révélé aujourd’hui Mark Gallagher (alors directeur marketing de Jordan), il s’agissait d’un mensonge destiné à protéger Frentzen et Jordan de la pression médiatique.

Voici ce qui affecta véritablement la Jordan. Au 27e tour, alors qu’il s’arrêta aux stands, suivi de près par la McLaren de David Coulthard, Frentzen comptait sur un arrêt sous pression mais rapide. Et ce qui devait arriver arriva : deux erreurs furent commises, l’une par le pilote, l’autre par son ingénieur de course Sam Michael.

Gallagher a expliqué que cet abandon avait été en réalité lié au fonctionnement de l’anti-calage…

« La clef du système, c’était qu’il fallait que le pilote le réactive, et ensuite le désactive. Et Heinz ne l’a pas désactivé quand il a quitté les stands. »

« Comme le dit Eddie [Jordan, directeur de l’équipe] dans son autobiographie, Sam Michael, l’ingénieur de course de Heinz, a toujours dit à Heinz lorsqu’il quittait les stands : "Désactive, désactive" [le système d’anti-calage], parce qu’il fallait annuler le système pour que tout fonctionne normalement une fois que vous aviez retrouvé la vitesse de course. »

« A cette occasion, Sam [l’ingénieur de course] ne l’a pas dit. Il a juste dit que Heinz avait "4,5 secondes d’avance sur Ralf Schumacher". Selon Eddie, Sam n’a pas répété les instructions, un rappel qu’il fait normalement au pilote. Il y avait beaucoup de pression sur Heinz, parce qu’il menait la course, beaucoup de pression sur l’équipe à cet arrêt. Vous pouvez imaginer que toute l’attention était concentrée pour que la voiture reparte en premier [face à Coulthard], ce que l’équipe a fait à merveille. »

« Dans cette tension et cette excitation, Sam avait peut-être oublié qu’il devait donner l’instruction standard à Heinz de désactiver le système, et comme Heinz était tout aussi concentré sur son avance et son retour en piste, le système n’a pas été désactivé. »

Deux oublis, coup sur coup : Jordan et l’Allemand n’ont pas eu de chance. La monoplace jaune fit encore quelques hectomètres avant de logiquement devoir s’arrêter.

Après l’épreuve, il avait donc été décidé de cacher le véritable motif de cet abandon, pour protéger Frentzen et ne pas en faire un « bouc émissaire » selon Gallagher.

« Il est impossible de décrire le sentiment qui régnait dans l’équipe ce soir-là, car nous avons très vite réalisé que c’était un abandon que nous nous étions infligé à nous-mêmes. »

« Mais il n’y avait pas de colère envers Heinz. Il faut se rappeler que nous avions gagné deux Grands Prix - Magny Cours et Monza avec Heinz. Le sentiment de l’équipe envers Heinz ne pouvait pas être meilleur. Avec tout le respect que je dois à Damon [Hill, son coéquipier], Heinz extrayait tout de la voiture, et Damon était effectivement à la retraite dans son cerveau, sinon sur la piste. »

« Nous avions donc une équipe avec une seule voiture. Mentalement, Heinz était dans une très bonne position. Quand vous regardez la pole au Nurburgring, c’était Frentzen au sommet de son art. »

Cet abandon conduit encore Gallagher à se demander « et si »… Et si Frentzen l’avait emporté – ce qui était plus que possible face aux Stewart GP - ? Et s’il avait pu rester en lice pour le titre ? Gallagher se prend alors à refaire l’histoire, et imagine une F1 au visage profondément changé.

« Avec le recul, on peut dire que s’il avait gagné cette course, la situation de Heinz en tant que pilote aurait changé et celle de Jordan en tant qu’équipe aurait probablement été transformée. »

« Bien que nous ayons terminé troisièmes au championnat du monde, ce qui est un exploit fantastique, si nous avions participé aux deux dernières courses en étant à égalité de points avec Hakkinen et Irvine… cela aurait continué à transformer l’opinion des gens sur Jordan. »

« Sans aucun doute, cela aurait mis plus de pression sur Honda pour qu’elle reconsidère sa vision de Jordan en tant qu’équipe à soutenir dans le futur [Jordan utilisait des moteurs Mugen-Honda mais est passée au second plan pour les Japonais, qui s’associèrent avec BAR en 2000]. »

« Bien que la relation BAR-Honda ait déjà commencé, elle était peu performante. Si Heinz avait terminé deuxième au championnat du monde ou même gagné, cela aurait été assez transformé toutes les relations existantes. Vous pouvez dire tout cela avec le recul. »

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