Une promotion non par la nationalité, mais par le mérite
Parmi les éléments ayant plaidé pour la titularisation de Yuki Tsunoda chez AlphaTauri l’an prochain, enfin officialisée ce matin sur les coups de 9h, aux côtés de Pierre Gasly, il y a certes la nationalité, japonaise, du pilote – à l’heure où Honda va conclure son partenariat avec AlphaTauri. Mais il y aussi et peut-être surtout une saison F2 totalement réussie de la part du rookie.
Rien ne semblait prédestiner Yuki Tsunoda à une telle promotion en F1 il y a encore douze mois. Car son parcours, satisfaisant, n’avait rien d’étincelant précédemment.
La F3 : le drame d’Anthoine, le déclic de Spa
Sa promotion en F2 cette année chez Carlin aurait pu sembler donc un peu précipitée. Mais avec 3 victoires, 4 poles et 7 podiums pour sa première saison en F2, Yuki Tsunoda a impressionné la plupart des observateurs. Sans aucun conteste, il est devenu le meilleur rookie de l’année en F2 – Mick Schumacher en était à sa deuxième saison. Et sa progression tout au long de l’année a démontré un potentiel certain.
Certes, Yuki Tsunoda n’a pas remporté la F2 dès sa première année, comme George Russell – mais ce dernier courait avec une équipe ART très bien rodée, tandis que Carlin est traditionnellement un petit ton en dessous.
En réalité 2020 s’est construit en 2019, à Spa-Francorchamps, dans ce week-end noir où Anthoine Hubert perdit la vie. Yuki Tsunoda avait encore du mal alors chez Jenzer, en F3 – deux points pris en 7 courses. Toute promotion en F2 était alors exclue…
Le déclic en F3 se produisit en réalité lors de ce week-end à Spa pour Yuki Tsunoda. « J’ai appris de lui, j’ai couru pour lui » racontait le Japonais, en évoquant Anthoine. « Le jour après son accident, j’ai obtenu mon premier podium de la saison. »
Notons qu’en reconnaissance à Anthoine, Yuki Tsunoda a d’ailleurs refusé que son nom soit gravé sur le trophée du prix Anthoine Hubert, récompensant le meilleur rookie en F2 – seul le nom de l’ancien pilote français devait y figurer selon lui.
Le round suivant Spa en F3, à Monza, Yuki Tsunoda enchaînait sur une 2e place et sa première victoire de l’année, sur le circuit italien. A cette occasion, il opposa une farouche résistance à Jake Hugues. Les deux jeunes pilotes croisèrent le fer notamment dans la Parabolique, avant qu’un freinage tardif de Yuki Tsunoda ne décide du vainqueur. Sans ce freinage tardif, Yuki Tsunoda aurait-il arraché sa place en F2 ? En tout cas, c’était cette preuve d’agressivité et de confiance que Helmut Marko voulait voir…
En F3, l’an dernier, en 16 courses, Tsunoda a donc signé une petite victoire pour 3 podiums (0 pole position) : grâce à une certaine constance, cela lui valut une 9e place au classement – une bonne saison donc, mais pas d’effet « waouh » particulier.
En F2 : des débuts difficiles…
La machine Yuki Tsunoda était ainsi lancée et en F2, le Japonais, chez Carlin, allait être impressionnant. Toute l’année, il a pu mettre sous l’éteignoir un autre protégé de Red Bull, Daruvala (qui avait fini pourtant 3e de F3 l’an dernier).
Un signe prémonitoire fut peut-être la toute première séance d’essais libres de la saison, au Red Bull Ring, où Yuki Tsunoda obtint la première place…
Mais comme en F3 les premières courses furent plus compliqués que prévu. C’est bien simple, lors de 6 des 8 premiers rounds, Yuki Tsunoda ne marqua aucun point. Lors des deux autres courses (longues) il obtint en revanche deux podiums.
Avant le déclic de Silverstone…
Le talent était là, la régularité pas encore. Cela viendra en deuxième moitié de saison. Sa première victoire fut un peu opportuniste, lors de la course sprint de Silverstone au Grand Prix du 70e anniversaire. Les deux rivaux de Prema et de l’académie Ferrari, Mick Schumacher et Robert Shwartzman, se rentrèrent dedans : Yuki Tsunoda était là pour recoller les morceaux.
Comme Spa en 2019, Silverstone fut le déclic de Yuki Tsunoda. Alors qu’il devait finir 5e pour sécuriser sa superlicence, Tsunoda fit bien mieux en finissant 3e. Il aura même signé le plus haut total de poles (4) après Callum Ilott, montrant un vrai potentiel en vitesse de pointe. Un podium en Russie lors de la course longue, des points lors des autres rendez-vous (sauf lors de la course sprint à Bahreïn), et surtout un dernier rendez-vous phénoménal à Sakhir achevèrent de convaincre Helmut Marko.
A Sakhir, justement, après avoir remporté la course longue sans coup férir, Yuki Tsunoda impressionna plus encore le lendemain en course sprint : parti 8e selon le principe de la grille inversée, il remonta méthodiquement jusqu’à la 2e place, en finissant à un souffle de Dan Ticktum.
Voici bien le signe montrant qu’il était prêt pour la F1, un an avant Mick Schumacher et Callum Ilott…