C’est une direction bicéphale qui est aujourd’hui à la tête de RB F1. D’un côté il y a le directeur d’écurie, Laurent Mekies (à la lui la gestion sportive). De l’autre, il y a Peter Bayer, le PDG de l’équipe (à lui le côté commercial).
Deux papes pour une seule Église, pour reprendre une expression d’Otmar Szafnauer… cela ne fait-il pas trop ? En clair, est-ce que Bayer et Mekies ne se marchent pas sur leurs plates-bandes ? N’y a-t-il pas des rivalités, des tensions entre les deux hommes ?
Dans une interview à Planet F1, Peter Bayer, le PDG de RB F1, a justement précisé son point de vue. Pour lui, la F1 est devenue si complexe qu’il vaut mieux être deux, et non pas seul pour diriger une équipe.
« Nous savions tous les deux dans quoi nous nous engagions et, en Formule 1, les gens disent toujours qu’il faut un patron et qu’il faut rendre des comptes. »
« Je l’ai dit à maintes reprises, je pense qu’aujourd’hui, la F1 a changé de manière spectaculaire au cours des deux dernières années. Elle a toujours été un sport mondial, mais aujourd’hui, c’est un phénomène mondial. Honnêtement, cela attire tellement de fans que tous les événements se déroulent à guichets fermés. Dans certaines régions des États-Unis, par exemple, nous enregistrons des taux de croissance à deux chiffres. »
« Il est évident que le sport est devenu beaucoup plus complexe qu’auparavant. Il y a les réglementations techniques et sportives, et maintenant les réglementations financières, qui sont tout aussi importantes, voire plus importantes encore. »
« Ensuite, il y a le marketing, les médias, la politique, qui sont toujours présents dans le paddock. Pour répartir les responsabilités, nous avons donc un organigramme très clair. »
« Laurent s’occupe des courses et du sport, moi je m’occupe des finances, des affaires et de la stratégie. »
N’y a-t-il cependant pas des redondances, des doublons entre le travail de Mekies et Bayer ? Comment l’éviter ? Le PDG de RB F1 explique sa méthode...
« Évidemment, les choses se chevauchent toujours. Nous nous parlons tous les jours, au moins deux fois je dirais, et nous nous rencontrons régulièrement pour nous informer et nous assurer que nous nous soutenons mutuellement et que nous allons de l’avant. Cela fonctionne donc très bien ! »
« Laurent et moi-même avons décidé dès le premier jour d’essayer d’apporter une nouvelle énergie et un nouvel esprit à l’équipe - nous insistons sur le fait qu’il s’agit d’une entreprise humaine et nous essayons de faire comprendre aux gens que chacun d’entre eux participe au succès ou à l’échec de l’entreprise. »
Et selon Bayer, cette direction bicéphale fonctionne : en témoigne l’attractivité retrouvée de l’équipe.
« Nous essayons de faire participer tout le monde au voyage et d’inviter les gens à en faire partie - et je pense que cela a été la plus grande source d’effort de ce que vous ne voyez pas dans les coulisses. »
« Ce qui se passe, c’est que nous attirons de nouveaux talents, des gens rejoignent soudain l’équipe ou nous demandent si nous sommes disponibles pour un poste dont nous n’aurions probablement pas rêvé de discuter avec eux il y a un an. Il y a donc une nouvelle dynamique. »
« Certaines personnes sont parties et nous avons donc eu un petit bouleversement dans l’équipe qui a eu besoin d’un moment pour se consolider, mais dans notre équipe, les gars ont été triés sur le volet pour travailler ensemble. »
Peter Bayer est loin d’être un bleu, bien sûr, en F1. Il était auparavant le secrétaire général de la FIA (Jean Todt l’avait recruté à ce poste). Il avait notamment chapeauté l’introduction du règlement financier sur les budgets plafonnés : un travail crucial.
Bayer est donc passé de la FIA à la direction d’une équipe : et il n’y a pas photo sur le poste le plus intense selon lui !
« C’est le jour et la nuit. La F1, c’est une montagne russe permanente. »
« La seule chose à laquelle je puisse penser qui soit similaire à ce que nous faisons, c’est probablement une équipe de Navy SEALs [le GIGN américain], un groupe de personnes qui ont prêté serment pour faire quelque chose ensemble - parce que vous avez dix équipes qui se battent très durement en F1. »
« Vous allez tout construire vous-même, l’équipe, vos espoirs, vos esprits, vous essayez d’entrer dans cet esprit de combat. Ensuite, on se bat et on éprouve soit la joie de gagner, soit l’agonie de perdre. J’adore ça. »
« Cela nous fait avancer et j’aime ce côté émotionnel. En revanche, à la FIA, il faut être équilibré tout au long du week-end. Il faut être à l’écoute de tout et conserver une approche neutre. »