Bernie Ecclestone a très fortement critiqué la gestion par la Formule 1 du Grand Prix de Belgique, dont la course s’est résumée à deux tours derrière la voiture de sécurité. Une manœuvre suffisante pour considérer que la course s’est déroulée, d’un point de vue contractuel.
L’ancien patron de la F1, qui critique régulièrement Liberty Media depuis qu’il a été évincé de son poste de PDG, a qualifié le dimanche à Spa de "catastrophe".
"J’aurais dit aux équipes et aux pilotes à 15h : ’Il pleut, nous sommes prêts à remettre ça d’une heure et j’espère que le temps va changer. Mais quoi qu’il arrive, la course commencera à 16 heures et ensuite c’est à vous d’y participer ou non’. Voilà comment il aurait fallu procéder," lance Ecclestone.
Laisser le choix aux pilotes de participer
La question de savoir s’il fallait démarrer ou non aurait dû être laissée aux mains des pilotes selon lui.
"S’ils voulaient prendre un risque pour obtenir des points, c’était à eux de décider. S’ils voulaient s’accrocher à l’idée de faire une course et faire beaucoup plus de tours pour s’assurer de gagner la course, c’est ce que la F1 aurait dû leur laisser faire."
"Si vous voulez courir, très bien, sinon, très bien aussi. Personne ne peut mettre un pistolet sur la tête de quelqu’un. C’était à eux de décider. Si j’étais au fond de la grille, je pourrais décider que ça ne vaut pas le risque parce que c’est sacrément dangereux là-bas. Si je voulais marquer des points pour l’équipe et pour moi-même, je pourrais y aller. Nous avons couru dans des conditions pires que cela à mon époque et nous n’avons pas annulé la course."
"Si nous étions dans l’armée et qu’on nous avait dit que nous devions aller en Afghanistan, nous aurions peut-être dit : ’Bon sang, cela ne semble pas sûr, mais nous devons y aller, nous n’avons pas le choix’. Mais la F1 ce n’est pas l’Afghanistan, les gens peuvent décider."
"Ensuite, si vous pensez qu’il est dangereux de rouler trop vite, ne roulez pas trop vite. Mais c’est un groupe de personnes différent maintenant qui gère la F1 et ils n’ont pas eu le courage. Ils ne veulent pas prendre de risques. Ils auraient pu faire deux tours, cinq tours, 50 tours ou pas de tours, mais la décision aurait dû appartenir à chaque pilote, de manière individuelle."
"Dans un sport dangereux, des gens peuvent être tués"
Lorsque l’on indique à Ecclestone qu’après le crash mortel d’Anthoine Hubert en F2 en 2019 sur ce même circuit et des alertes avec plusieurs accidents sévères au cours du week-end que c’était peut-être normal d’être plus prudent qu’à son époque, il répond :
"Dans un sport dangereux, des choses peuvent arriver et des gens peuvent être tués à tout moment. Quand les gens nettoient les vitres dans de grands immeubles de bureaux, la nacelle peut tomber et ils peuvent mourir. Et ils ne sont pas payés très cher pour le faire."
"Ces pauvres gens qui se battaient en Afghanistan se sont fait dire qu’ils devaient aller là-bas et se battre et ce n’était pas leur choix. C’était dangereux et beaucoup d’entre eux ont été tués."
"Dans le cas de Spa, les pilotes avaient le choix. S’ils voulaient prendre un risque pour marquer des points, c’était à eux de décider."
Prendre exemple sur le GP du Japon 1976 ?
Se rappelant la pluie battante à Fuji en 1976, le Britannique ajoute : "C’était notre toute première émission télévisée mondiale. Je voulais commencer la course alors j’ai dit à tout le monde ’Je ne vous oblige pas à conduire’. ’Si vous ne voulez pas conduire, ne le faites pas. Mais la course va commencer’. Niki Lauda s’est arrêté après le premier tour et j’ai pensé que c’était bien."
"Vous n’avez aucune influence sur la météo, mais vous avez une influence sur la façon dont vous la gérez," ajoute Ecclestone.
"On pouvait dire à Spa que personne ne voulait prendre ses responsabilités et prendre des décisions. En fin de compte, ils ont tout mal fait ensemble."
Ecclestone se range même du côté de Lewis Hamilton, qu’il critique souvent, pour avoir souligné que les deux tours derrière la voiture de sécurité étaient essentiellement motivés par l’argent.
"Comment pouvez-vous faire les deux tours derrière la voiture de sécurité comme ça et ensuite agir comme Stefano (Domenicali) et dire ’Il n’y avait aucune raison commerciale à cela !’ Ce n’est pas vrai !" accuse Ecclestone.
"Il y a des contrats. En prenant le départ de la course et en réalisant les tours minimum pour un résultat, leur contrat est rempli. L’organisateur est donc obligé de payer le titulaire des droits."
"Moi, j’aurais fait faire beaucoup plus de tours à la voiture de sécurité. D’une part, pour vraiment espérer que le temps s’améliorera, mais aussi parce que cela ne pourrait pas être plus révélateur que de s’arrêter après exactement deux tours. Maintenant, tout le monde sait que c’était uniquement pour des raisons commerciales."
"Je ne suis pas d’accord avec tout ce que Lewis dit, mais il est assez intelligent pour soulever les choses et dans ce cas, il avait évidemment tout à fait raison. Pouvez-vous penser à une autre raison que l’argent ? Je ne peux pas. Il y avait évidemment beaucoup de pression. S’ils annulaient la course sans résultat, le promoteur devait reverser tout l’argent au public."
"Et je suis sûr qu’ils auraient quand même dû payer leurs frais de course au détenteur des droits commerciaux, tout comme les télévisions qui sont également sous contrat. Donc, la personne qui aurait souffert plus que quiconque aurait été le promoteur. Ce n’était pas un bon signal à donner pour la Formule 1."
Ecclestone appelle maintenant Liberty Media à rembourser les spectateurs détrempés de Spa.
"Avec l’argent que les détenteurs de droits ont gagné sur ces deux tours, ils devraient dédommager les fans qui sont restés sous la pluie pendant dix heures. Il leur resterait encore assez de bénéfices !"