« Frérots mais pas trop ». On se souvient de la une de « L’Équipe » du début de saison 2023, laissant présager une mauvaise entente entre Pierre Gasly et Esteban Ocon chez Alpine.
Il n’en a rien été. Certes les deux pilotes ne sont pas devenus meilleurs amis après les tensions qui avaient effectivement émaillé leurs années junior… mais l’ambiance demeure sinon très amicale, du moins très professionnelle. En piste comme hors piste.
Dans ce fameux duel 100 % Normand, Pierre Gasly a mieux performé que prévu : même s’il arrivait dans un environnement qu’Ocon connaissait déjà, il est monté en puissance. Et s’est même assuré de remporter le duel interne en qualifications avant la fin du championnat.
« C’est toujours important » mentionne à ce sujet Pierre Gasly pour le podcast "Beyond the Grid".
« Vous pouvez demander à n’importe quel coéquipier, à n’importe quel pilote, vous savez que la première comparaison que les gens font est le face-à-face avec votre coéquipier. C’est toujours quelque chose d’important. Je fais la course pour battre les 19 pilotes, mais finalement, quand vous vous battez contre Max Verstappen avec la Red Bull cette saison, les chances de le battre sont très faibles. »
« Mais ensuite, contre votre coéquipier… c’est la personne que vous pouvez comparer directement à l’intérieur de l’équipe, donc c’est toujours important. »
« Je savais que ce ne serait pas facile pour moi, surtout quand on arrive dans l’équipe et alors qu’Esteban a passé quatre saisons avec eux déjà. Je savais que cela prendrait du temps et le temps n’est pas ce que j’aime vraiment. Je ne suis pas patient et je voulais vraiment que les choses fonctionnent tout de suite. Mais cela a pris quelques courses et maintenant j’ai l’impression que nous sommes sur la bonne voie. »
N’est-ce pas d’ailleurs le samedi, en qualifications sur un tour rapide, que l’on peut jauger le mieux la différence de performance entre deux pilotes, sans les incertitudes d’un Grand Prix ?
« Oui, c’est toujours un exercice difficile parce que vous n’avez qu’un tour, c’est de la vitesse pure. Mais tout est important. Les points sont marqués le dimanche. Évidemment, le dimanche, sur une distance de course complète, il peut se passer beaucoup plus de choses. Vous avez tendance à croire que les choses s’équilibrent à un moment donné - pas pour moi cette saison, j’ai l’impression que les dieux de la chance n’ont pas vraiment été de mon côté. Mais si cela signifie que nous serons meilleurs la saison prochaine, je l’accepterai. »
Pas trop de tensions, même après Melbourne ?
Pierre Gasly avait-il tout de même des appréhensions au moment de retrouver Ocon dans une même équipe de F1 ? Il l’admet à demi-mot...
« Je savais que ce ne serait pas facile, mais en fin de compte, je pense que nous avons très bien travaillé. Je pense que nous avons compris la responsabilité qui était la nôtre. Ma principale préoccupation était de bien travailler avec lui, de m’assurer que nous tirions le maximum de la voiture, le maximum de l’équipe, et que nous poussions tous les deux dans la même direction. »
« Il y aura toujours une saine rivalité, l’un voulant battre l’autre. Mais ce qui m’importe le plus, c’est que cela n’ait pas d’impact sur l’évolution de l’équipe et de la voiture. »
« Je ne dirais pas que nous sommes amis. Nous ne passons pas beaucoup de temps ensemble. Avec Esteban, nous nous battons tous les deux pour notre carrière. Nous voulons tous les deux atteindre le sommet. Nous voulons tous les deux être les leaders de l’équipe. Je l’accepte et je suis prêt à relever le défi. J’accepte la compétition parce qu’en fin de compte, Esteban est un pilote très rapide et très talentueux. Il l’a prouvé. C’est ce dont vous avez besoin en tant que coéquipier, quelqu’un qui va vous pousser, quelqu’un qui va pousser l’équipe. Vous voulez quelqu’un de compétitif. »
« Je respecte vraiment cela. Je sais à quel point il veut me battre. En même temps, il sait exactement à quel point je veux le battre à chaque fois. Ce n’est pas quelque chose de personnel car, en fin de compte, je me soucie des 19 pilotes. Je veux les battre tous. Pour les battre tous, j’ai besoin qu’Esteban me pousse et pousse l’équipe à améliorer la voiture. »
Même après Melbourne, en fin de Grand Prix, lorsque les deux pilotes Alpine s’étaient rentrés dedans après le drapeau rouge, il n’y avait donc eu aucune tension entre Ocon et Gasly ? Ce dernier revient sur cet épisode avec franchise...
« Honnêtement, c’était difficile. Dans l’avion du retour, j’étais triste parce que, pour moi, c’était la troisième ou quatrième course de la saison avec l’équipe, et je me battais avec la Ferrari, avec la Mercedes. J’avais le podium en vue, avec Lewis et Fernando à quelques secondes, mais c’était un résultat important qui devait lancer la saison sur la bonne voie. Quitter l’Australie après tout ce travail et tous ces efforts, avec zéro point, était le pire scénario possible, avec les deux voitures dans le mur. J’ai mon opinion et c’était un incident de course. »
« C’est vraiment dommage que nous ayons tous les deux fini de cette façon. J’ai perdu beaucoup plus que lui ce jour-là avec la cinquième place, qui était à prendre, mais s’il s’était agi de quelqu’un d’autre, la situation aurait été à peu près la même. Nous avons discuté. Nous sommes allés à Paris et nous avons discuté avec Laurent Rossi. Il avait son avis, j’avais le mien, on sentait qu’il aurait pu faire marche arrière, mais il ne l’a pas fait et finalement on a avancé, on s’est serré la main. Nous nous sommes mis d’accord entre coéquipiers pour prendre un peu plus de marge. »
« Je ne savais pas qu’il était là sur la piste. Aurait-il pu agir différemment ? Probablement, mais cela ne s’est pas produit et c’est ainsi que les choses se sont passées. Nous sommes allés de l’avant et nous nous sommes concentrés sur notre travail afin de tirer le meilleur parti de la voiture pour les courses suivantes. »