La ‘bromance’ entre Yuki Tsunoda et Pierre Gasly a fait rire beaucoup de fans de la F1… mais elle se basait bien sûr sur une certaine réalité : la véritable complicité entre les deux ex-coéquipiers chez AlphaTauri.
Cette relation spéciale en F1 pose question : peut-être ami avec son coéquipier, quand ce dernier est pourtant aussi son premier rival ?
C’est à ce dilemme intéressant pour la F1, qu’a tenté de répondre justement Pierre Gasly, invité récent du podcast "Beyond the Grid". Et il se montre aussi amical qu’impitoyable pour Yuki Tsunoda !
« Il est important, tout d’abord, de dire que même si j’ai eu cette sorte de relation fraternelle avec Yuki, cela n’enlève rien au talent et à la vitesse qu’il avait. Je l’ai toujours dit, je pense que Yuki n’a pas assez de crédit et de reconnaissance pour la vitesse qu’il a certains jours. S’il contrôle ses émotions et son langage, il peut être extrêmement rapide. J’ai l’impression que les gens sous-estiment ce qu’il peut apporter. »
« Mais même si nous nous amusions et que nous avions une très bonne relation, lors des essais, des qualifications ou de la course, je voulais le détruire. Pas dans le mauvais sens du terme, je voulais juste le surpasser à chaque séance. Le désir d’être le meilleur, le défi et la compétition prendront toujours le dessus sur tout le reste. Cela ne veut pas dire que vous perdez le respect ou que vous allez aller plus loin que la limite - vous jouerez toujours entre les règles - mais à la fin de la journée, ce qui me satisfait en rentrant chez moi le dimanche, c’est de sentir que j’ai fait le meilleur avec la voiture qu’on m’a donnée. C’est le but ultime. »
« Évidemment, le moment que j’aime le plus est celui où je monte dans cette voiture, où je me bats avec les 19 meilleurs pilotes du monde, et cet exercice qui consiste à les battre et à chercher chaque centième et millième que je peux trouver dans cette voiture, c’est la satisfaction absolue. »
Plus globalement, il semble y avoir une bonne entente entre tous les pilotes sur la grille. Cette bonne entente avait été notamment symbolisée par le dîner des pilotes, fin 2022, pour dire au revoir à Sebastian Vettel qui prenait sa retraite...
« C’était un sacré dîner » se souvient Pierre Gasly.
« Je me souviendrai toujours de ce moment. C’était la première fois en cinq ans que nous nous retrouvions tous ensemble. C’est probablement l’une des rares fois où l’on voit le vrai côté des gens et des pilotes. Vous avez toujours eu des relations plus étroites avec certains pilotes. Mais c’est comme si, lors de ce dîner, à partir du moment où nous avons fermé la porte, nous avons tous enlevé nos casquettes de nos têtes, et vous avez juste ce que vous voyez. »
« Que ce soit Lewis, Sebastian, Daniel, tout le monde a raconté toutes sortes d’histoires, que je ne vais pas raconter ici ! C’était hilarant et ça faisait plaisir à voir. Nous sommes tous des pilotes de course, nous voulons tous nous battre les uns les autres, parfois cela dépasse un peu les limites, mais au bout du compte nous sommes tous des gens normaux avec une vie qui est assez extraordinaire. »
Et lors de ce dîner, Pierre Gasly a-t-il vu la "face cachée" d’un pilote qu’il ne soupçonnait pas ?
« Je m’entends bien avec presque tous les pilotes. Mais oui, Lewis était génial, Seb était génial, Yuki nous faisait tellement rire. À la fin, nous nous sommes tous regardés et nous nous sommes dit : "Pourquoi ne l’avons-nous pas fait plus tôt ? Pourquoi avons-nous attendu cinq ans pour le faire ?’’ Alors, faisons en sorte que cela se reproduise le plus tôt possible. On rencontre beaucoup de gens en Formule 1, mais on ne peut se fier qu’à très peu de personnes, parce qu’on passe beaucoup de temps sur la route et qu’on n’a pas beaucoup de temps à la maison. »
Gasly et Leclerc, une amitié ouverte
Mais Pierre Gasly l’admet aussi : avec un tel emploi du temps, il n’est pas facile, voire impossible, pour un pilote de F1 de cultiver de réelles amitiés tout au long de l’année...
« Vous n’avez pas un grand cercle social d’amis très forts et très proches. On n’en a pas beaucoup quand on court en Formule 1. Nous avons probablement réalisé que nous avions peut-être un peu plus d’amis que nous ne le pensions dans le paddock. C’est une vie qu’il est difficile d’expliquer et je me sens souvent mal à l’aise à l’idée de parler des expériences que j’ai vécues dans ma vie, parce qu’on a l’impression d’être arrogant. On dirait que vous allez vous vanter de certaines choses. Je sais que ce n’est pas normal. »
Le plus proche ami de Pierre Gasly sur la grille demeure peut-être Charles Leclerc, le pilote Ferrari.
« Il m’arrive parfois de penser que ma vie est un film hollywoodien. C’est pourquoi j’aime beaucoup les discussions que je peux avoir avec Charles [Leclerc], parce que je sais qu’avec lui nous discutons de nos vies respectives et que nous ne nous jugeons pas l’un l’autre. Je sais que c’est presque comme un endroit heureux, un endroit confortable où vous pouvez vous ouvrir. Il comprendra, je le comprendrai. On veut vraiment garder les pieds sur terre et profiter de chaque instant, mais j’ai appris qu’il y a des choses que l’on peut partager et d’autres qu’il faut être un peu plus prudent dans la manière de les présenter. »
D’ailleurs, les rumeurs disent que Charles Leclerc battrait facilement Pierre Gasly aux échecs...
« Le gars a gagné une partie contre moi et tout de suite on sort ça ! J’ai eu sa dame tout de suite et j’ai pris trop de confiance un jour… je pensais que je l’avais remis en place dès le début. Il est très bien revenu dans le match. Mais je le lui ai déjà dit, la revanche arrive très vite ! »