De tous les directeurs techniques en F1, Adrian Newey est certainement le plus connu et reconnu.
Après Williams et McLaren, c’est aujourd’hui avec Red Bull que l’ingénieur britannique (qui aurait pu devenir artiste ou historien) triomphe.
À l’occasion du titre constructeurs de Red Bull, obtenu au Japon, la FOM a interrogé plusieurs anciens de la maison de Milton Keynes, pour nous éclairer sur la place centrale occupée par Newey dans son succès.
Robert Doornbos, pilote du début de l’ère Red Bull, commence fort avec une comparaison… osée.
« Adrian est comme l’Einstein de la F1. J’ai vraiment compris son cerveau lors d’une journée de tests où nous essayions quelque chose de nouveau sur la voiture. À un moment donné, il m’a demandé si je pensais qu’il serait possible de conduire une F1 avec les deux pieds l’un sur l’autre, le pied sur le frein en bas et l’accélérateur au-dessus du frein, afin que la voiture soit plus fine et plus lisse à l’avant. »
« J’ai répondu : "Physiquement, ce n’est pas possible". Il m’a regardé et a écrit quelque chose. Il m’a dit : ’Je veux changer quelque chose’. Et il a continué : ’Ce quelque chose, c’est entre le volant et le moteur’. J’ai dit : "C’est moi !’ En fait, si vous lui donnez carte blanche, il veut avoir un robot à l’intérieur de la voiture ou quelque chose du genre. L’équilibre entre le facteur humain et le fait qu’il ne pense qu’en termes de chiffres et de données est tout à fait extraordinaire à travailler. Il repousse les limites. »
Newey devrait-il être anobli ?
Mark Webber, l’ancien acolyte (ou souffre-douleur) de Sebastian Vettel chez Red Bull, abonde dans le même sens. Lui-même avoue être surpris par les idées parfois exceptionnelles de Newey.
« Certaines des idées qu’il a évoquées en passant, je me suis demandé où il allait les chercher… et, trois mois plus tard, on les retrouvait sur le circuit, sous une forme différente. Il veut comprendre, être extrêmement, extrêmement ouvert et honnête sur les problèmes et s’y attaquer de front. Il continue à comprendre qu’hier n’était jamais assez bien, et c’est ce que j’aime chez lui. »
Webber explique donc ce que Newey, qui avait déjà remporté bien des titres constructeurs avec Williams ou McLaren, a apporté à Red Bull : la volonté de toujours pousser plus loin, de ne pas se satisfaire de quelques succès prometteurs.
L’Australien voudrait aujourd’hui que Newey soit anobli, au même titre que Lewis Hamilton récemment… ou que Patrick Head chez Williams.
« Lorsque nous avons commencé à avoir beaucoup de doublés, c’était génial pour Christian aussi, parce que Christian n’avait évidemment pas connu cela, et Helmut non plus, mais Adrian avait connu cela. Et Adrian nous disait : " Eh bien, attendez, nos arrêts aux stands sont encore merdiques, travaillons-les ". Et on se demandait : "Bon sang, quand est-ce qu’il va finir ?". »
« C’était vraiment génial de l’avoir comme colonne vertébrale technique de tout le département. Bien sûr, il a d’autres personnes autour de lui, et il est très à l’écoute - on ne peut pas avoir la carrière qu’Adrian a eue si une personne comme lui n’est pas à l’écoute. J’aime sa discrétion et son immense humilité. Il devrait être fait chevalier, point final. Pour moi, ce n’est même pas un sujet de discussion. »
Christian Klien, lui aussi pilote titulaire au début de l’ère Red Bull, conclut en affirmant que sans Newey, Red Bull n’aurait probablement pas rencontré le succès que l’on sait aujourd’hui.
« L’arrivée d’Adrian au sein de Red Bull a été une étape importante. On pouvait également sentir dans le paddock que Red Bull n’était pas seulement là pour faire la fête, mais qu’elle prenait les choses au sérieux avec Adrian Newey. Je pense que c’est ce qui a permis à l’équipe de s’engager sur la voie du succès. »