La F1 est aujourd’hui en crise et se demande combien de Grands Prix pourront être vraiment courus en cette année 2020. La FOM veut officiellement en maintenir entre 15 et 18, mais il s’agit là d’un objectif qui pourrait sembler de jour en jour, de plus en plus utopique.
Interrogé par Canal + sur la question du calendrier, le champion du monde Jacques Villeneuve a été clair : il ne faudrait pas préférer la quantité à la qualité.
« Les premiers Grands Prix du calendrier devraient être ceux de septembre. Mettre le plus possible de Grands Prix, ce serait une erreur, il ne faudrait pas se gaver non plus, juste parce qu’il faut absolument, quel que soit le coût, d’arriver à un championnat. Il faudra peut-être avoir l’intelligence de dire : il n’y aura pas de championnat, il y aura des courses, et chaque course sera un évènement, comme Indianapolis, comme les 24 Heures du Mans, pour dire que chaque Grand Prix devienne un Grand Chelem – plutôt qu’un championnat qui ne serait qu’un championnat à moitié, et ce pour préparer 2021. »
« Magny-Cours a encore des standards F1, donc pourrait organiser demain un Grand Prix. Donc pourquoi ne pas profiter de cette saison, pour faire quelques Grands Prix qui ne sont pas prévus au calendrier - qu’on pourrait déjà jeter à la poubelle ? »
« Mais j’ai l’impression que la FIA est en train de tout recentrer sur le virtuel, l’e-gaming. Sera-t-il possible, ensuite, de rebasculer vers le réel ? Ce n’est pas du sport, c’est du jeu vidéo. »
L’organisation d’un maximum de Grands Prix permettrait cependant de réduire les dégâts au niveau financier… Mais Jacques Villeneuve veut voir à plus long terme que la simple urgence de liquidités.
« Il n’y jamais eu un danger comme aujourd’hui ; mais j’ai peur que la F1 ne regarde pas vers le long terme, et qu’elle regarde vers le prochain mois, en se disant, comment va-t-on faire rentrer les sous ? Pour s’autodétruire au passage. Mais quelque chose de bien pourrait peut-être en sortir. »
La crise permettrait-elle ainsi d’assainir les comptes, et d’éliminer les équipes qui étaient de toute façon trop fragiles ?
« Plein d’équipes sont en énorme danger, c’est peut-être le moment d’une énorme remise en question, d’un nettoyage, pour que des équipes trouvent de nouvelles méthodes de survie. Certaines écuries ont eu beaucoup de mal lors des dernières années, avaient déjà du mal à survivre lorsque la F1 était en [bonne] santé. Là clairement, il va y avoir un passage difficile pour certains, et ce n’est peut-être pas les petites équipes qui vont souffrir, car elles ont l’habitude d’avoir des petits budgets. Car [la crise] donnera l’excuse à plusieurs gros sponsors de se retirer, ce serait lamentable, mais contractuellement, socialement et politiquement possible. Il va y avoir un remaniement total, et il est donc primordial de repartir sur de bonnes bases. »
« Mais la F1 n’a jamais appris par le passé, alors pourquoi apprendrait-elle maintenant ? »
Sur la gestion de Melbourne et du premier Grand Prix, Jacques Villeneuve a enfin fait son autocritique.
« Cela aurait pu se décider avant. Mais tous, moi y compris, n’avons pas voulu voir la réalité. On en a tous payé le prix après. Heureusement qu’il y ait tout de même eu une réaction. La F1, et Melbourne, ont été un peu la boule de neige pour lancer le processus au niveau planétaire. »