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La F1 en fait-elle assez sur les carburants durables ? Shell répond à Vettel

L’objectif pour 2026 est-il assez ambitieux ?

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Pour atteindre l’objectif affiché de neutralité carbone en 2030, la F1 franchira une étape majeure en 2026, avec l’utilisation, impérative, de carburants 100 % d’origine renouvelable (10 % aujourd’hui).

Il s’agit là d’un défi d’ampleur, le plus grand depuis le changement de réglementation moteur en 2014 selon Mercedes.

Shell, le pétrolier et fournisseur de carburant de Ferrari, se prépare donc aussi à ce tournant de la discipline. Plus de 50 personnes travaillent en ce moment même, dans des locaux basés à Hambourg, à ce nouveau carburant, ce qui représente plus de 20 000 heures de travail annuel.

Valeria Loreti, responsable de la production pour le sport automobile chez Shell, pense jour et nuit (ou presque) à ce fameux carburant qui succèdera à l’E10, qui alimentera les V6 en masse dans quelques années.

Comment s’adapte-t-elle à la perspective de ce changement majeur ? En quoi cela représente-t-il un grand changement par rapport au passé ?

« Auparavant, le développement était plus étendu - dans le passé, nous avions l’habitude d’apporter des évolutions au fil des ans, donc c’était des éléments rapides à développer léger, c’était une amélioration continue. »

« Puis nous avons dû concevoir un carburant E10 en 2020 et 2021 qui puisse durer une saison complète. C’était une grande différence car vous saviez que vous n’aviez aucune chance d’apporter des évolutions en cours d’année, il fallait donc répondre aux attentes, qui sont toujours très élevées. »

« Cela augmente la pression, mais cela vous donne plus d’opportunités. Lorsque nous avions un cycle de développement très rapide, nous apportions trois ou quatre évolutions au cours de la saison, il ne fallait donc prendre que les évolutions sûres. »

« Mais quand on a un an devant soi – et pour 2026 on a encore plus de temps – on a la chance de vraiment explorer des domaines qui étaient auparavant tabous. »

« De toute évidence, vous ne prenez pas de risques élevés. Nous avons donc vraiment dû repenser la façon dont nous développons nos carburants. Nous devons travailler encore plus étroitement avec nos partenaires à Maranello parce que l’unité de puissance est développée plus en amont, et le carburant est développé encore avant, et le but est vraiment d’essayer de faire correspondre les deux. »

Loreti décrit également l’évolution du métier de fournisseur de carburant : le numérique prend de plus en plus de place dans le travail quotidien. Pour un réel gain d’efficacité ?

« Il faut vraiment trouver toutes les nuances et les subtilités pour faire de ce produit le meilleur pour cette unité de puissance. »

« Le numérique nous a beaucoup aidés. Il y a 10 ou 15 ans, les principales améliorations reposaient sur le savoir des personnes, mais aussi sur une approche fondée sur les échecs et les erreurs, en laboratoire et dans le moteur. Cela signifie que vous pouvez avoir des dizaines d’échantillons développés en laboratoire et testés et quelques-uns d’entre eux seulement vont dans le moteur. »

« Nous avons maintenant la possibilité de modéliser les propriétés du carburant en fonction des composants que vous mettez à l’intérieur. Nous avons tous ces algorithmes créés par des personnes très intelligentes qui ont développé cet outil pour prédire les propriétés du carburant en fonction de la chimie de combustion des composants. »

« Ce qui se passe, c’est que nous pouvons idéalement mettre autant de données que nous le voulons, et l’année dernière pour ce carburant E10, nous avons fait plus d’un million de simulations. C’est tellement au-dessus de ce que nous avions l’habitude de faire, et cela vous donne évidemment une énorme quantité d’opportunités. »

Shell répond à Vettel

Ces derniers mois, Sebastian Vettel, connu pour ses engagements environnementaux, a lourdement critiqué la lenteur de la F1à adopter des carburants 100 % durables et pertinents pour les voitures de route.

La FIA se retrouve visée, mais Shell, qui a pesé dans les négociations, peut également se sentir concernée : que répond alors Loreti à Sebastian Vettel ?

« Quand vous parlez aux pilotes, tout doit arriver maintenant – ils vivent très vite ! Mais évidemment, si vous devez le faire rapidement, vous devez le faire correctement et vous devez le faire de manière vraiment durable. Il est donc très important que nous abordions le problème à la racine et que nous réfléchissions à ce dont la Scuderia Ferrari a besoin. Ils auront certainement besoin d’énergie, ils auront besoin d’efficacité dans le carburant, mais ils auront aussi besoin de durabilité environnementale. »

« Cet élément de durabilité doit être vraiment solide - la réglementation porte sur l’ensemble du cycle de vie du carburant, donc il ne s’agit pas seulement de recopier quelque chose qui a été fait, je ne sais pas comment, il s’agit de regarder le carburant en considérant globalement la problématique des émissions de gaz à effet de serre. »

« C’est une approche très solide, car notre travail sur le carburant 2026 est très proche du travail que nous devons faire pour respecter la directive énergie [de la Commission européenne] pour les carburants pour les voitures de route. Les règlements F1 prescrivent des produits chimiques similaires à ceux que nous avons dans les carburants des voitures de série, c’est la meilleure plate-forme que nous ayons. »

« Nous avons quelques années pour rechercher quelque chose qui sera durable, applicable aux carburants pour les voitures de route - parce que les règles sont très, très proches. Mais nous devons aussi trouver quelque chose de très innovant parce que ce que veut Ferrari, et ce que veut la Formule 1, c’est le meilleur du meilleur. Vous ne pouvez pas simplement prendre ce qui existe déjà, vous devez vraiment trouver une nouvelle opportunité. »

« La Formule 1 a choisi la voie de la durabilité, ce qui est absolument conforme aux changements de la société et également conforme aux objectifs que nous avons au niveau de l’entreprise. Shell a déclaré vouloir d’ici 2050 ou avant, nous voulons devenir un fournisseur d’énergie à zéro carbone. »

Une question se pose enfin : à quel point ce nouveau carburant durable en 2026 sera-t-il pertinent pour les voitures de route ? Pour les produits de Shell au quotidien ?

« Si vous regardez l’avenir, il y aura probablement différentes énergies à fournir à la société, mais vous aurez toujours un rôle très important à jouer pour les biocarburants. Les « carburants durables », c’est une définition qui englobe beaucoup de choses, et tous les carburants apportent une sorte de propriétés. »

« Pour la Formule 1, nous avons la possibilité de choisir, de modifier ces éléments afin d’obtenir la qualité dont nous avons besoin. Cela nous donne une plate-forme de recherche et d’innovation que nous pouvons exploiter pour générer de nouvelles connaissances, en identifiant peut-être certaines choses qui sont réellement précieuses pour l’application de carburant pour voitures de série. »

« Nous voulons en faire plus. Nous mènerons deux projets en parallèle [voitures de route et F1], car pour Ferrari, nous avons encore besoin de fabriquer ce carburant sur mesure qui réponde vraiment à leurs exigences pour l’unité de puissance F1 - cela va également évoluer - mais nous en extrayons des connaissances pour les équipes qui développent les nouveaux carburants Shell V Powers de demain. »

« C’est une excellente opportunité car nous pouvons vraiment tester un nouvel actif et nous avons des ingrédients complètement nouveaux. C’est comme être dans une nouvelle cuisine. »

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