L’affaire a éclaté après le Grand Prix du Brésil : McLaren souhaite obtenir des éclaircissements sur l’interprétation du règlement concernant les changements de moteur et leur prise en compte dans le plafond budgétaire. La question : une équipe peut-elle installer un moteur neuf pour améliorer les performances sans que cela ne soit comptabilisé dans ses dépenses plafonnées ?
Cette interrogation est née après la décision de Red Bull de monter une unité de puissance neuve sur la monoplace de Max Verstappen afin de disposer d’un léger avantage en performance, une initiative qui, selon McLaren, devrait avoir un coût financier à assumer. Problème : le règlement ne définit pas clairement dans quels cas un changement de moteur doit être intégré au budget cap.
À l’heure actuelle, la seule mention explicite concerne les remplacements "en raison d’une panne, en raison d’un accident ou de toute autre cause induite par l’équipe". Le terme "induite" reste suffisamment vague pour laisser place à l’interprétation, poussant les équipes à demander des clarifications.
Red Bull, de son côté, estime être parfaitement dans son droit. À Las Vegas, l’ingénieur en chef Paul Monaghan s’est montré confiant à ce sujet (à lire ici).
Interrogé lors de la conférence de presse du jour, Nikolas Tombazis, directeur des monoplaces à la FIA, a admis que le cadre réglementaire actuel n’offre pas suffisamment de précision pour trancher clairement.
"Nous n’avons pas souhaité entrer dans une situation où, à chaque changement de moteur, nous devons débattre avec l’équipe ou le motoriste pour savoir si une donnée de télémétrie indique réellement un problème de fiabilité ou non," explique-t-il.
"Nous n’avons pas l’expertise pour argumenter avec eux sur le fait qu’il s’agisse véritablement d’un problème de fiabilité ou d’un choix stratégique. Dans certains cas, cela ne fait aucun doute, mais dans la zone intermédiaire, ce serait difficile."
Tombazis reconnaît ainsi une faille structurelle : "C’est une faiblesse du règlement actuel, la combinaison du financier, du technique et du sportif. C’est un domaine dans lequel nous avons adopté cette approche consistant à accepter les changements sans entrer dans une discussion sur l’impact sur le budget cap."
Jusqu’ici, cette ambiguïté ne posait pas de problème majeur : la majorité des changements de moteur survenaient à cause de réels soucis de fiabilité. Mais le contexte de la bataille serrée entre équipes fait désormais émerger le risque d’un usage stratégique.
La FIA avait anticipé le risque. Dès 2026, les motoristes seront eux aussi soumis à un plafond. À partir de là, toute unité supplémentaire aura automatiquement un coût.
"Avec le plafond qui s’appliquera aux motoristes ainsi qu’aux équipes, le problème sera résolu," assure Tombazis.
"Les motoristes n’auront aucun intérêt à effectuer un changement stratégique, car cela leur coûtera à chaque fois environ le prix du moteur, un million si c’est seulement le moteur thermique. Cela créera un mécanisme naturel."
Pour lui, la faille actuelle disparaîtra d’elle-même : "C’est une faiblesse de la réglementation actuelle, où il n’y a pas de budget cap moteur. Mais dès l’an prochain, elle sera complètement résolue. Le sujet n’existera plus."
Les nouvelles règles incluent une marge budgétaire dédiée aux questions de fiabilité, permettant aux motoristes d’ajuster leurs dépenses selon les unités réellement utilisées. Les montants prévus sont pour un moteur thermique de un million de dollars, pour un turbo 150 000 $, pour un MGU-K 175 000 $, pour l’électronique de contrôle 215 000 $ et enfin 215 000 $ pour la batterie.
Autant d’éléments qui limiteront grandement l’usage stratégique des changements de moteur !