C’est Alessandro Alunni Bravi qui a remplacé Frédéric Vasseur, parti vers Ferrari, chez Alfa Romeo ; mais l’Italien a plutôt le poste de représentant de l’équipe, dans un rôle plus de communication et de représentation.
Cela correspond d’ailleurs au profil de Bravi : il n’est pas ancien ingénieur, mais a fait carrière dans le marketing. Cependant la F1 n’est bien sûr pas sa première expérience du sport auto puisqu’il a pu exercer dans ses fonctions en WRC et GP2, travaillant notamment avec Nicolas Todt.
Alessandro Alunni Bravi ne croit pas d’ailleurs que son profil étonne ou détonne dans le paddock, citant notamment le parcours de Toto Wolff.
« Je sais que les gens disent toujours que pour être directeur d’équipe, il faut avoir une formation d’ingénieur, mais je pense que cela dépend de la structure de chaque équipe. Certains directeurs d’équipe sont d’anciens ingénieurs, parce que l’équipe avait besoin de ce type de profil dans cette structure particulière » dit-il à Racer.
« Par ailleurs, il y a ceux qui ont davantage un profil de manager, comme Toto Wolff ou Christian Horner. Tout dépend donc de la façon dont vous structurez le groupe et les activités de l’équipe. »
Comment Bravi se situe face à Seidl
Bravi n’est pas la tête pensante à proprement parler de Sauber-Alfa Romeo : au-dessus de lui, se trouve Andreas Seidl, le PDG de Sauber. Mais comment se passe la répartition des rôles dans l’équipe ? Seidl semble plus concentré sur 2026 et l’arrivée d’Audi comme motoriste, est-ce cela ?
« Tout d’abord, nous travaillons ensemble main dans la main au quotidien. Quelqu’un peut donc penser qu’Andreas travaille sur l’avenir et que je m’occupe du présent et de la période ‘intermédiaire’ de l’équipe, avant 2026, mais ce n’est pas le cas. Nous travaillons 24 heures sur 24, sept jours sur sept, pour améliorer l’équipe afin d’obtenir des résultats dès maintenant pour nos partenaires dans les années à venir, mais aussi pour poser les bonnes fondations pour ce qui sera un plus grand défi : devenir une équipe d’usine à partir de 2026. »
« Mais nous construisons notre avenir ici et maintenant. C’est donc un processus que nous menons tous ensemble, avec notre direction et notre personnel. Il ne s’agit pas d’un seul individu, mais d’un travail que nous accomplissons ensemble. Et bien sûr, nous avons nommé James Key [comme directeur technique]. Je pense que cela montre l’ambition de Sauber Motorsport sur ce que nous voulons pour l’avenir. »
« Nous voulons améliorer la qualité de notre groupe. Nous voulons développer chaque secteur. Et je pense que James contribuera à façonner - avec nous et Andreas - le département technique, qui est l’un des principaux départements d’une écurie de F1. »
Bravi refuse de penser que Sauber devrait sacrifier le court terme pour miser sur 2026 : pour lui, séparer les temporalités peut ne pas avoir de sens.
« Nous préparons l’avenir dès maintenant. Nous devons donc obtenir des résultats solides pour nous, pour nos partenaires, au cours des deux prochaines années, et c’est pourquoi nous nous attaquons à toutes nos faiblesses, et nous travaillons dur pour améliorer chaque domaine. James Key est un exemple de notre vision en la matière, mais nous nommons des personnes dans tous les départements - c’est juste que nous ne le divulguons pas. »
« Il s’agit d’un processus. Combien de temps cela prendra-t-il ? Nous avons vu par le passé, avec Red Bull ou Mercedes, qu’il n’est pas facile d’arriver et de gagner. Il faut du temps. Vous avez besoin de temps pour trouver les bonnes personnes, vous avez besoin de temps pour développer votre infrastructure. »
« Vous aurez besoin de temps, car en Formule 1, il y a une grande inertie, et lorsque vous prenez une décision, vous devez parfois attendre parce que les gens sont soumis au "congé de jardinage"... mais vous devez créer votre organisation et la faire fonctionner. »
Des objectifs sont-ils déjà fixés pour 2026 et Audi ? Un podium dès la première année par exemple ?
« Je ne pense pas qu’il soit correct de parler de date ou d’heure. Nous sommes en 2023. Nous avons terminé 6e au classement des constructeurs l’an dernier, ce qui est le meilleur résultat de Sauber au cours des 10 dernières années. Mais la route est longue. Bien sûr, nous devons travailler au quotidien pour être prêts à être plus compétitifs en 2026. Mais ce sera le début du projet. »
« N’oublions pas que ce sera la première année d’Audi en Formule 1, en tant qu’équipe d’usine, en tant que manufacturier à part entière. Nous ne pouvons donc pas fixer d’objectif, mais ce sera la première année où nous devrons avoir une structure prête à relever les défis. Ensuite, nous verrons. »
« Si nous avons fait du bon travail, nous serons compétitifs, sinon nous saurons que nous devons nous améliorer et que nous avons du pain sur la planche. Il n’est donc pas vraiment opportun de se fixer un objectif de podiums ou de lutte pour la victoire. »
Bravi ne regretterait-il pas aussi que Seidl prenne toute la lumière ou le crédit pour avoir bien géré la transition avec Audi, pour 2026 ? Se satisfait-il de ce rôle de ’bouche-trou’, pour reprendre un terme à la mode... ?
« La récompense n’est pas d’être plus populaire ou d’avoir mon visage reconnu dans le paddock, je pense que la récompense est le respect de votre équipe. Je ne ressens pas de grande différence entre travailler dans les coulisses ou maintenant, j’espère juste que je représente l’équipe de la bonne manière. »
« Peut-être que mes amis ont maintenant l’occasion de me voir plus souvent à la télévision, et pas seulement trois ou quatre fois par an quand j’ai la chance de rentrer chez moi pour rester avec mes amis ! Mais pour moi, la récompense, c’est de faire du bon travail au quotidien pour l’équipe. »
« Et j’espère que les gens comprendront à travers moi l’engagement et les efforts que nous consacrons à ce projet. En tant qu’équipe, nous travaillons dur pour nous développer. On peut faire le bon choix, on peut faire de mauvais choix, mais je suis une personne qui n’a jamais eu peur de prendre une décision. Pour moi, il est important de prendre des décisions. »
« En Formule 1, vous devez assumer la responsabilité de ce que vous faites. C’est la partie la plus importante de mon travail. »