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Le retour de Briatore : la triple faute de Renault

Une faillite morale, managériale et sportive à venir ?

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La nouvelle que nous vous annoncions hier soir a été confirmée ce matin : Flavio Briatore est officiellement de retour chez Alpine F1.

Dans un court communiqué, l’équipe française a dit confirmer la nomination de Flavio Briatore comme "conseiller exécutif pour les activités Formule 1".

Le retour de Briatore n’est pas une absolue surprise, loin de là : son ‘come-back’, ou son retour en grâce, si l’on veut, étaient des rumeurs qui circulaient avec de plus en plus d’insistance dans le paddock.

La nouvelle fait en ce moment grand bruit sur les réseaux sociaux. Certains prétendent qu’il y a justement trop de bruit pour rien.

Après tout, Flavio Briatore n’est-il pas aussi l’homme qui a permis à Benetton puis Renault de gagner deux titres pilotes d’affilée ? Sa condamnation « à vie » par la FIA suite au ‘Crashgate’ dont il fut l’instigateur à Singapour en 2008, n’a-t-elle pas été transformée en exclusion pour cinq ans par la justice française ? Briatore ne jouait-il pas déjà ce rôle de ‘conseiller de l’ombre’ depuis plusieurs années… ? La F1 n’est-elle pas l’empire des combinazione ?

Du reste, Pat Symonds, qui avait été lui aussi au cœur du ‘Crashgate’, n’avait-il pas fait son retour chez Virgin dès 2011… et n’a-t-il pas été embauché par Stefano Domenicali lui-même comme directeur technique de la F1 (Symonds est aujourd’hui directeur technique d’Andretti) ?

Personne ici ne contestera le rôle, considérable, qu’a pu jouer Briatore dans les succès passés de l’équipe d’Enstone. Ni la force de ses réseaux ou son expérience de la F1, toujours très utile.

Mais sur les réseaux sociaux, de très nombreuses voix critiquent et vilipendent une faillite morale, managériale et sportive d’Alpine F1.

Une faillite morale

Le retour de Briatore peut être en effet perçu comme une véritable faillite morale.

Certes, Briatore a ‘purgé’ sa peine et peut légalement faire son retour en F1.

Mais le signal éthique envoyé par le groupe Renault est absolument désastreux. Comment réhabiliter un homme qui a été à l’origine du plus gros scandale moderne de tricherie en F1 et même dans le sport de haut niveau ? Comment réhabiliter un ‘malin génie’ (pour ne pas dire un ‘génie du mal…) dont la tricherie a été à l’origine de la vente précipitée de l’équipe, et d’un scandale ayant largement entaché l’image du groupe Renault à l’époque ? Pourquoi réactiver ces mauvais souvenirs aujourd’hui et maintenant ?

Sur son site internet, le Groupe Renault met en avant ses valeurs éthiques et l’on peut lire notamment ceci : « L’alignement de notre Raison d’Être, de notre éthique et de notre stratégie contribuent fortement à la pérennité du groupe. Nous voyons dans le respect et la promotion de l’éthique et de la conformité un levier essentiel de performance et une source d’attractivité. »

Comment ce discours pourrait rester pleinement crédible demain, alors même que l’image du groupe, la réputation d’une marque, comptent aussi pour beaucoup dans la perception et donc la valorisation d’un projet d’entreprise ?

En somme, le retour de Briatore viendra démentir, demain, tous les discours que pourra faire Alpine F1 sur l’importance de l’éthique, de la respectabilité, des valeurs humaines, etc.

Séparer l’efficacité de l’éthique est simpliste : les deux se rejoignent. Rappelons que Renault a engagé Alpine en F1 pour valoriser l’image de sa marque : quelle image est donc renvoyée aujourd’hui ?

Pire qu’une erreur : une faute.

Une faillite managériale

On le sait, l’éthique, la morale, ne comptent parfois pas beaucoup en F1. Mais la faillite n’est pas seulement morale.

Elle apparaît aussi comme une faute en termes de management, et notamment de management humain.

Dans le communiqué officiel, il est bien précisé que c’est Luca de Meo qui est directement à l’origine de cette nomination : « BWT Alpine F1 Team confirme que Flavio Briatore est nommé par Luca de Meo, CEO de Renault Group, conseiller exécutif pour les activités Formule 1. »

Cette nomination apparaît donc comme un camouflet notamment pour Bruno Famin. Le directeur d’écurie, qui peinait déjà à imposer son autorité, aura désormais dans ses pattes un conseiller exécutif encombrant, drapé dans ses trois titres passés, et qui pourra apparaître, à tort ou à raison, comme un directeur d’écurie bis. La position de Famin est indéniablement fragilisée, alors même qu’elle était déjà chancelante.

La nomination de Briatore apparaît aussi comme un désaveu pour les talents de l’équipe : n’y avait-il donc personne d’autre pour jouer ce rôle de conseiller ? Alpine F1 est-elle si peu attractive, traverse-t-elle une telle crise de ressources humaines qu’il faut rappeler des gloires déchues ?

Une faillite sportive à venir ?

Enfin la nomination de Briatore arrive dans un contexte catastrophique pour Alpine F1, qui est celui d’une double faillite sportive.

Faillite sur le plan des résultats : en dépit des récents progrès et du travail acharné des ingénieurs qu’il faut saluer, Alpine F1 a raté ses objectifs de performance et ses résultats en 2024 sont indignes du statut d’équipe d’usine.

Avec la nomination de Briatore, Renault envoie le signal suivant : pour construire l’avenir, il n’y a rien de mieux que le passé, fût-il peu reluisant. Car après tout, y a-t-il encore un projet d’avenir chez Renault ?

Ce statut d’équipe-d’usine, Alpine F1 pourrait en effet le perdre prochainement. Car l’équipe réfléchit sérieusement à abandonner Viry et le développement d’une nouvelle unité de puissance, pour devenir une équipe-cliente à partir de 2026. Un cinglant désaveu bien sûr pour le projet moteur de Renault.

Dès lors une question se pose : Briatore n’a-t-il pas été nommé pour faire le sale boulot ? En effet le communiqué officiel précise que l’Italien « sera amené à proposer des évolutions sur la structure actuelle du projet et conseillera sur tous les sujets stratégiques de la discipline. »

Parmi ces « sujets stratégiques » figurera sans doute l’abandon possible du projet moteur de Renault pour 2026. Finalement, pour faire le sale boulot, ne fallait-il pas un dirigeant à l’honneur sali ?

Marx disait que l’histoire se répète deux fois, une fois en tragédie, l’autre en comédie – mais cette nomination a tout de la mauvaise farce…

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