Alors que certains pilotes actuels ont grandi avec un kart à la place d’un biberon – Max Verstappen était dans un kart dans l’âge de quatre ans et demi – ce ne fut pas du tout le cas de Nicholas Latifi, le nouveau titulaire chez Williams.
En effet, le Canadien n’a grimpé dans un kart qu’à l’âge – très tardif pour aujourd’hui – de douze ans. De plus, il a fait son apprentissage, en Amérique du Nord, sur des monoplaces comme des Ford Mustang (à Daytona) et des Porsche 911 (en British Carrera Cup), loin des standards de la pure monoplace.
« Mon parcours en sport auto a été assez peu conventionnel » reconnait le pilote Williams en ce début d’année chamboulé par la crise sanitaire.
« Je ne viens pas d’une famille qui s’intéressait au sport automobile, je n’ai pas de background en sport auto » poursuit-il.
Le père de Nicholas est en effet un richissime homme d’affaires, ce qui était tout aussi utile pour faire carrière en sport auto, quand l’on connaît le prix des formules de promotion.
C’est donc près de Toronto que Nicholas Latifi a fait ses armes sur circuit, en kart… quand il fut repéré par David Tennyson, un ancien pilote d’IMSA.
« Il m’a convaincu, en gros, de commencer la course » raconte Latifi.
« Le plus drôle, c’est qu’on m’a demandé plusieurs fois d’essayer des karts en course, parce que je ne m’intéressais pas à la compétition ; c’était quelque chose que je voulais plus que faire comme un passe-temps. »
« La troisième fois, j’ai été un peu poussé. Mes parents m’ont dit : "Si tu n’aimes pas ça, tu n’as pas besoin de continuer, alors autant essayer une seule course." J’ai donc essayé une seule course et j’ai accroché... J’avais 13 ans et la passion est née de là, et l’amour pour ça, et le reste, c’est de l’histoire. »
Nicholas Latifi regrette tout de même d’avoir grandi en Amérique du Nord, un continent moins propice pour le sport auto.
« Le niveau était élevé selon nos standards [nord-américains], mais j’ai fait quelques courses en Europe, une poignée d’entre elles, et on ne peut pas comparer les deux - c’est juste tellement mieux pour apprendre et développer de courir en Europe. La compétition est beaucoup plus dense et vous apprenez donc beaucoup plus. »
Nicholas Latifi reconnaît donc ainsi, et c’est tout à son honneur, que son apprentissage de la course a d’abord été plus théorique que pratique, plus abstrait que concret.
« Parce que j’ai commencé si tard, beaucoup de ressentis... ne m’ont pas été transmis aussi naturellement. »
« Mon entraîneur m’a donc appris d’abord à conduire sur le papier - littéralement sur un tableau blanc, en dessinant... La façon dont on m’a enseigné était donc probablement plus basée sur la théorie - une sorte de "science de la conduite". »
« Quand vous prenez un gars qui a été mis dans un kart à quatre ou cinq ans… c’est tout ce qu’ils savent - c’est comme apprendre à parler une langue maternelle, ça leur vient tout naturellement. Alors que moi, j’apprenais une deuxième langue, et c’est venu beaucoup plus lentement. »
Nicholas Latifi a finalement rencontré un succès progressif en formules de promotion. Son accession en F1 a été acquise au terme d’une ascension régulière mais plus lente que celle de vrais prodiges, comme Charles Leclerc ou Max Verstappen. Latifi a tout de même tenté de rattraper un maximum son retard, en courant dans toutes sortes de formules (F2, F3, Florida Winter Series, Formule Renault 3.5., Porsche Carrera…)
« Tout cela pour rattraper le temps perdu » concède-t-il.
« Quand je suis passé aux monoplaces, j’avais encore peu d’expérience en sport automobile, et je pense toujours que ce n’est pas quelque chose de mauvais, mais on me juge encore dessus… »