Depuis son 2e domicile en Autriche, et alors que les usines châssis et moteur de Mercedes F1 sont toujours à l’arrêt pour quelques jours encore (sauf pour produire des respirateurs), Toto Wolff doit tout de même continuer à gérer, à distance, sa vaste organisation, notamment en prenant des nouvelles de chaque employé.
« C’est très difficile pour tout le monde » a-t-il commencé par rappeler.
« En un sens, il faut rester présent, et donc la connexion quotidienne [avec votre équipe] est importante. Mais en même temps, la force de notre organisation, c’est d’être soudés. Si quelqu’un venait à être laissé de côté, le reste du groupe prendrait le relais. C’est une force qui est vraiment spécifique à Mercedes. »
Pour gérer au mieux la situation actuelle, Toto Wolff peut s’appuyer sur un style de management qui a fait ses preuves en F1. Pour autant, l’Autrichien ne semblait pas destiné à diriger une organisation grande de centaines d’employés…
« Je viens de la finance, et l’organisation que je dirigeais employait 27 personnes… Et quand j’ai commencé chez Williams, j’ai commencé comme directeur non-exécutif. Je me suis retrouvé soudain dans une situation opérationnelle et cela a plutôt bien marché. Puis en 2012, une porte s’est ouverte et Mercedes m’a demandé si je voulais occuper un autre rôle, de manager. Cela semblait très excitant sur le moment ; et cela fait huit ans que je gère cette entreprise. J’espère le faire au meilleur de mes capacités. Six titres d’affilée, c’est un assez bon record. »
« Je n’ai jamais eu de boss dans ma vie, car j’ai commencé très tôt avec ma propre entreprise. Et puis j’ai lu beaucoup. Et que ce soit chez Williams ou en DTM, j’ai pu suivre des styles de management différents – le micro-management, en allant dans chaque détail, jusqu’à l’autre versant, en laissant tout le monde évoluer comme il l’entend. Il s’agit surtout de développer les individus, de former une culture, un esprit d’équipe, et autour de lui de définir les objectifs prioritaires. Ce n’est pas quelque chose que l’on peut faire sur un Powerpoint, mais cela prend des années ; et jusqu’à présent, nous nous en sortons bien. »
Au cours de ces dernières années, Toto Wolff a développé un style de leadership qui, sans renoncer au côté émotionnel de la F1, laisse une grande part à l’efficacité et la rationalité.
« Vous ne pouvez mener les autres qu’en montrant l’exemple. J’essaie d’agir de manière calme, d’être émotionnel sans être trop excité par toute situation. Les gars dans l’équipe savent que je pourrai avoir de bons ou mauvais moments, mais c’est important de vous calibrer. Et c’est seulement alors que les gens ne chercheront plus à vous cacher certaines choses. C’est un ingrédient important pour démasquer tout problème qui se présente, pour accuser le problème et non la personne. »
Et comment gérer les si nombreux problèmes d’ego en F1, qui sont le lot des pilotes bien sûr, mais aussi de certains ingénieurs ou mécaniciens ?
« L’ego, ce peut être un très puissant stimulant, mais seulement dans une certaine limite. J’ai vu de gros egos échouer en F1, parce qu’ils n’arrivaient pas à réfléchir sur eux-mêmes. »
« Je crois dans un scepticisme personnel, nous souffrons tous d’un certain syndrome de l’imposteur – vous vous demandez quelle est votre vraie contribution par rapport à ce que les gens pensent. C’est ce qui vous fait garder les pieds sur terre. Donc contrôler notre ego est très important. »