En 2021, Lewis Hamilton regrettait que la F1 soit devenu un club de « petits garçons milliardaires » (voir notre article). Mais la situation n’est pas non plus très rose en formules juniors.
La F2 est un luxe que certains ne peuvent pas se permettre : Zak O’Sullivan, lâché par Williams, vient par exemple de se retirer du championnat F2, faute de moyens.
Pour percer en F2, faut-il être donc fils de millionnaire ou protégé d’une filière junior ? Oliver Bearman, qui sera titulaire chez Haas F1 ce week-end, et dont le paternel est lui-même fortuné, a cependant été couvé par la Ferrari Driver Academy.
Le retrait de O’Sullivan est ainsi l’occasion de poser une question de fond : la F2 est-elle devenue insupportable financièrement ? Que peut en dire Bearman ?
« Oui, c’est triste, c’est un pilote très talentueux et je pense qu’il était sur la bonne voie. Son équipe était un peu en difficulté, mais par rapport à son coéquipier, il performait très bien en tant que rookie. Une situation comme celle-là, quand vous ne pouvez pas finir la saison à cause du financement, ce n’est pas facile. »
« Les budgets sont de plus en plus élevés chaque année dans les séries juniors. Et oui, sans l’aide de mes sponsors et partenaires, je n’aurais pas pu faire ce que j’ai fait. C’est difficile parce que, vous savez, il faut se financer soi-même et trouver le soutien financier. Et sans cela, vous ne pouvez pas montrer votre talent. Et je suis triste pour Zak parce que je pense qu’à chaque fois que j’ai couru avec lui, il s’est très, très bien comporté. J’ai une très bonne opinion de lui en tant que pilote. C’est donc une situation difficile et triste à la fois. »
Franco Colapinto lui a été soutenu par la filière Williams F1 : sans elle, aurait-il pu courir en F2 malgré tout, avec ses sponsors argentins ?
« Oui, Zak a montré cette année qu’il était solide. Il a fait du bon travail. Malheureusement, le sport automobile est ainsi fait. C’est très difficile à certains égards. C’est un sport très, très cher et c’est quelque chose que nous ne pouvons pas changer. Nous avons maintenant le soutien de nombreuses entreprises qui s’intéressent à ce sport. La F2 s’est beaucoup développée par rapport aux dernières années. La F3 aussi. Et je pense que cela nous a permis, à nous les pilotes, de trouver plus de sponsors. Et cela nous a beaucoup aidés. Mais c’est difficile. Bien sûr, c’est très triste pour lui. Je suis sûr qu’il trouvera un moyen de revenir. C’est un pilote très talentueux. Alors oui, espérons que nous y parviendrons. »
250 000 dollars pour une saison de karting ? C’est fou pour Alonso
Le vieux sage Fernando Alonso courait en formules juniors il y a bien longtemps, à une époque où la F3000 coûtait presque moins cher qu’une saison de karting aujourd’hui !
« Nous sommes tous d’accord pour dire que le sport automobile est extrêmement cher à l’heure actuelle, et pas seulement dans les catégories supérieures » regrette le pilote Aston Martin F1.
« Je pense que le karting est devenu un peu trop cher, vous savez, 200 000, 250 000 pour une saison de karting aujourd’hui, cela ne semble pas être un point de départ logique pour tout amateur de sport automobile. Donc, oui. Ce n’est pas une solution facile. Et je ne sais pas comment cela pourrait être contrôlé d’une certaine manière. Mais oui, je pense que nous sommes tous concernés par cette question. »
« C’est définitivement un sujet de discussion parce qu’au cours des huit dernières années, je pense que le prix a déjà doublé » confirme enfin Pierre Gasly, dont les parents avaient dû consentir à de lourds sacrifices financiers.
« Alors quand j’entends le prix de la Formule 2 par rapport à ce qu’il était avant, et que vous parlez de plus de 2 millions, sans aucune garantie d’arriver à un niveau professionnel et de pouvoir vivre de ce sport, je suis tout à fait d’accord. Je suis donc tout à fait d’accord pour dire que c’est un problème que nous devons résoudre. Le nombre de courses a augmenté. Les prix ont augmenté. Mais cela réduit les chances de certains talents potentiels qui ne disposent pas des fonds nécessaires. »
« Et je suis d’accord avec Fernando. Cela commence déjà au karting. Je ne connais pas beaucoup de gens autour de moi qui peuvent payer autant pour un enfant de 10 ou 11 ans. J’espère qu’en tant que sport, nous en sommes tous conscients. Je pense qu’il s’agit de prendre les bonnes mesures. »
« Nous faisons beaucoup d’améliorations en matière d’intégrité, de diversité, etc., mais nous devons absolument faire un pas dans cette direction en réduisant les coûts pour donner plus d’opportunités à plus d’enfants. Car même à titre personnel, j’ai eu de très bons amis en karting qui étaient très talentueux et qui ont finalement arrêté après la Formule 4 parce qu’ils ne pouvaient pas se permettre de suivre financièrement. Alors oui, j’espère qu’en tant que sport, nous pourrons nous attaquer à ce problème. »