« Problème de corrélation ». Ces trois simples mots sont de nature à effrayer tout directeur d’écurie, parce qu’ils signifient une simple chose : tout le développement et le travail abattus à l’usine, risquent de livrer des résultats contre-productifs.
Que ce soit chez Renault, Red Bull ou Ferrari ces dernières années, ces « problèmes de corrélation entre la piste et la soufflerie » (ou la CFD) ont été régulièrement mis à l’avant pour expliquer de franches déceptions au moment d’introduire des évolutions.
C’est ce sujet qu’a abordé le très respecté James Allison (directeur technique de Mercedes et ancien de Ferrari et Lotus)…
« C’est une question intéressante, vous entendez souvent les équipes parler de ce sujet. C’est une sorte de réponse universelle pour expliquer pourquoi les choses ne fonctionnent pas parfois. »
« Nous avons tous des outils pour rendre les voitures plus rapides, à l’usine, comme la soufflerie, la CFD, et avec ces outils nous pouvons contrôler nos expérimentations, voir d’où nous partons, et nous rendre compte que les nouveaux designs de certaines pièces sont plus performants que les anciens, qu’ils apportent plus d’appui avec le même niveau de traînée par exemple. »
« Par conséquent nous nous attendons à ce que les performances soient meilleures sur la piste. Cependant parfois, l’usine vous dit que ces pièces seront très rapides, mais le chronomètre ne le dit pas, le pilote dit qu’il ne sent aucune différence, et ainsi, vous n’avez plus de corrélation, vos chiffres ne correspondent plus à la réalité. »
La tâche, qui prend alors plusieurs mois, est alors de comprendre d’où vient ce problème… Comment alors s’y prendre selon Allison ?
« Pourquoi cela arrive ? Dans les années 80 ou 90, cela arrivait simplement parce qu’on utilisait des souffleries trop petites, ou parce que l’électronique n’était pas assez stable. »
« Aujourd’hui, cela n’arrive plus, le hardware est vraiment bon dans chaque équipe. Ce qui arrive aujourd’hui, c’est que, quand vous faites une expérience à l’usine, cette expérience est proche de la réalité, elle est censée reproduire les conditions de la réalité, qui est un environnement plus complexe. »
« Et cette expérimentation ne sera jamais parfaite, ce sera un compromis. Dans ce compromis, vous prenez toutes sortes de décisions, et chaque équipe fait différents compromis, chaque écurie a différentes manières de traiter le comportement des pneus, de gérer le vent car il est différent dans une soufflerie par rapport à la vie réelle. »
« Et ces décisions sont vraiment cruciales pour le résultat final. »
Même quand la corrélation est acquise, cela ne l’est enfin que pour un temps donné…
« Il s’agit de réactualiser cette recette chaque année, avec des pneus différents, des châssis différents sur le plan de l’aérodynamique. Et si vous échouez, il faut changer les conditions de votre expérimentation, pour que vous soyez plus proche de la réalité. »