Si McLaren s’est autant redressé depuis 2016, une bonne part du mérite doit en revenir à Zak Brown, le PDG de McLaren Racing. Arrivé en 2016 sur la pointe des pieds à la suite de Ron Dennis, l’Américain, peut-être longtemps trop sous-estimé, a fait place nette autour de lui, en provoquant le départ de Eric Boullier ; puis en nommant Andreas Seidl, le directeur de l’écurie McLaren en F1, comme son bras droit opérationnel.
L’organisation a prouvé son efficacité et le bilan de Brown, malgré les difficultés financières du coronavirus, peut être salué.
Au-delà du redressement structurel, Zak Brown a amené également une autre culture chez McLaren : fini, le gris austère du rigide Ron Dennis ; bienvenue à l’orange plus chaleureux, sur la voiture comme dans la gestion quotidienne, de l’usine de Woking.
« Si je regarde ce qui était le plus gros problème de McLaren, c’était le manque de clarté et de leadership » a confié Zak Brown sur son travail de réorganisation.
« Vous aviez Ron qui partait et revenait, [Martin] Whitmarsh aussi, [Eric] Boullier, [Jost] Capito. Oubliez tous ces individus : ce n’est pas la recette du succès. »
« Les actionnaires ont reconnu que nous avions besoin d’une personne chargée de diriger McLaren Racing, de clarifier les choses en interne et en externe, et d’y aller. »
« Parce que lorsque je suis arrivé, il y avait tellement de changements, et clairement des problèmes au sein du conseil d’administration. Or si vous n’avez pas de leadership clair au sommet, comment l’organisation est-elle censée savoir dans quelle direction elle doit aller ? »
Comme il l’a souvent fait par le passé, Zak Brown critique donc sévèrement la gestion finale de l’équipe par Ron Dennis.
Et Zak Brown de citer un exemple ubuesque en particulier.
« La façon de travailler était notre plus gros problème. Il y avait des problèmes de personnes et d’autres pas au sein de cette structure. »
« Nous avons des gens aujourd’hui qui sont géniaux, qui quand je suis arrivé étaient moins géniaux. Et c’était à cause de l’environnement dans lequel ils étaient, pas à cause de qui ils étaient. Et puis il y a eu un manque de leadership au plus haut niveau pour reconnaître cela et y remédier. »
« J’ai discuté avec l’équipe de nuit et ils ne pouvaient pas utiliser la salle de gym. Pourquoi ne pouvez-vous pas utiliser la salle de sport ? Eh bien, pour des raisons de santé et de sécurité, la personne qui s’occupait de la salle de sport travaillait de huit à six. »
« Vous ne devriez pas être puni parce que vous travaillez de nuit… »
Zak Brown n’avait clairement pas le prestige d’un Ron Dennis en F1 ; mais sans pression, il a pu avancer plus tranquillement.
A-t-il d’ailleurs pu être sous-estimé dans le paddock, quand on a vu un "Américain" succéder à la légende Dennis ?
« Alors... j’hésite, parce que je répondrais à cette question de plusieurs façons. Une seule façon semble assez arrogante ! »
« J’avais l’impression de devoir faire mes preuves. Mais je pense que les gens m’ont vu comme un gars chargé des sponsors qui fait de la course auto, et peut-être qu’ils ont pensé que j’allais essayer de diriger l’équipe [au jour le jour]. Et je n’en ai jamais eu l’intention. »
« Il y avait des points d’interrogation à mon sujet, mais c’était juste. Et c’était une source de motivation pour moi. Mais je n’ai pas non plus passé trop de temps à m’inquiéter de ce que les autres pensent de moi. »
« Ayant dirigé une entreprise toute ma vie, la seule chose qui compte vraiment est ce que votre équipe pense de vous, de l’entreprise et des actionnaires. Ce qui me préoccupe le moins, c’est ce que mes concurrents pensent de moi. Ce qui est important, c’est ce que les fans pensent de moi, les sponsors pensent de moi, mes actionnaires pensent de moi, mon équipe de course pense de moi. »
« Ce que tout le monde dans la pitlane pense de moi, je m’en moque éperdument. »
La méthode Zak Brown
Désormais à Woking, Zak Brown se félicite d’avoir une organisation solide et bien en place, qui a prouvé son efficacité. C’est l’occasion pour lui de rendre hommage aux hommes et femmes et de l’ombre.
« Vous n’avez jamais eu une seule personne qui peut prendre une décision sur tout. Les organisations ont besoin de cela. »
« Mon équipe de direction à l’usine, dans laquelle j’inclus Andreas, est excellente. Et ils ont eu une influence massive sur le succès de l’équipe. »
« Le moral ne s’améliore pas seulement grâce à moi, Andreas et l’équipe de course. Notre nouveau directeur des ressources humaines [Daniel Gallo], que nous appelons "People and IT", a eu un impact considérable en m’aidant à remettre l’organisation à plat. Il y a aussi Laura [Bowden], ma directrice financière - je ne peux pas diriger une équipe de course sans avoir une excellente directrice financière, qui m’aide à prendre des décisions difficiles, à mettre les gens au défi, à avoir de la prévisibilité, de la visibilité et à tenir le conseil d’administration informé. »
« Ces personnes n’ont jamais le mérite pour ce qu’elles font. Ils ne sont pas là, vous ne les voyez pas. Ce sont mes huit cylindres. »
Enfin Zak Brown rend aussi hommage aux actionnaires de McLaren, puis aux sponsors, qui ont fait confiance progressivement à son projet.
« J’ai toujours eu le soutien total des actionnaires, il n’a jamais faibli. Il a fallu un peu de temps pour les embarquer, je suis nouveau pour eux. Puis il a fallu un peu de temps pour que les sponsors y croient. Et ensuite pour que les fans s’engagent. »