Massimo Rivola admet que l’essor que connait la F1 aujourd’hui facilite grandement les implications commerciales et médiatiques. Le directeur d’Aprilia en MotoGP reconnait que pour le championnat du monde moto, la situation est légèrement différente.
L’Italien a été autrefois directeur du marketing de Minardi, puis team manager dans l’équipe italienne et dans son itération suivante, Toro Rosso. Après cela, il a été directeur sportif chez Ferrari avant de rejoindre le MotoGP.
"La Formule 1 vit un moment fantastique si l’on regarde comment les gens la perçoivent" a déclaré Rivola. "Je ne pense pas que l’on puisse comparer la fascination de la Formule 1 avec celle du MotoGP, c’est quelque chose de bien plus grand."
"Mais le spectacle que nous offrons en MotoGP est bien meilleur que celui de la F1. Nous devons donc trouver un moyen d’obtenir globalement plus de sponsors et d’attirer plus de monde en général. Si l’on regarde numériquement combien de personnes la Formule 1 fait bouger, c’est différent."
"Nous ne devrions donc pas nous contenter de ce que nous avons obtenu, même si l’accueil sur les circuits n’est pas si mauvais, à l’exception du Mugello. Je pense que certaines circonstances ont fait que cette course n’a pas vraiment été un point fort en termes d’audience."
Des sponsors qui ne veulent pas juste se montrer
En effet, le MotoGP a souffert du départ de Valentino Rossi, qui attirait un grand nombre de spectateurs sur les circuits, spécialement en Italie. Mais c’est une donnée plus complexe à laquelle les équipes doivent faire face. En effet, elles peinent aujourd’hui à attirer des sponsors importants.
Aprilia, par exemple, n’a pas de sponsor-titre. Rivola, dont le cœur de métier était initialement le marketing, explique que les marques ne veulent plus simplement apposer leur logo sur les carrosseries, mais veulent une implication plus importante, très souvent sur le plan technique.
"La pandémie de coronavirus n’a certainement pas aidé, pas plus que la situation avec la Russie. Globalement, les entreprises qui investissent beaucoup d’argent dans un projet comme le nôtre ne sont pas seulement intéressées par le sponsoring."
"Le sponsoring est aujourd’hui différent de ce qu’il était dans le passé. vant, c’était ’voilà l’autocollant, on le met sur la moto et c’est tout’. Aujourd’hui, il s’agit davantage de créer un business ou de négocier avec le groupe Piaggio pour faire du business."
"Avec Castrol, par exemple, nous avons commencé par un sponsoring, mais maintenant c’est un partenaire technique. Nous travaillons avec eux sur le carburant, nous développons le produit. Il faut trouver de tels sponsors."
L’effet ’Drive to Survive’ n’a pas eu lieu en MotoGP
A l’instar de la F1 et de sa série Netflix ’Drive to Survive’, le MotoGP s’est allié à Amazon Prime Video pour lancer son show sur les coulisses d’une saison. La mini-série, qui se nomme ’MotoGP Unlimited’, était plutôt réussie.
On y découvrait le quotidien de plusieurs pilotes, l’envers du décor des Grands Prix, et l’ensemble sonnait globalement plus juste que son équivalent en F1. Mais le fait que ce ne soit pas porté par Netflix, en plus d’autres problèmes, n’a pas permis au programme de s’imposer et d’attirer un nouveau public vers le MotoGP.
"Netflix a donné à la Formule 1 un coup de pouce qui n’a pas été donné à notre série documentaire. L’effet n’a pas été le même. Je pense donc que du côté de Dorna, il faut se demander pourquoi cela a été le cas. J’ai vu les deux séries documentaires et je me suis fait une opinion."
"Je ne dirais pas que cela ne me regarde pas, je suis prêt à en parler avec la Dorna s’ils y réfléchissent. Je pense que les pilotes de F1 sont plus glamour. Les pilotes de MotoGP s’entraînent toujours, ils montrent de la passion pour ce qu’ils font. En F1, on voit davantage le style de vie et cela aide peut-être les jeunes à suivre la F1."
Les Sprints ne feront pas de miracles
Mais Rivola n’est pas dupe, et il rappelle que le manque de succès vient aussi du fait qu’on ne peut pas promouvoir de manière similaire la moto et la F1. Dorna, le détenteur des droits commerciaux du MotoGP, doit trouver sa propre recette pour donner envie au public de suivre son produit phare.
Cette année, le concept de Sprint arrivera en MotoGP, et le test se fera sur l’ensemble du calendrier. Le concept permettra de pimenter la journée du samedi, mais n’offrira rien de plus qu’une course de MotoGP classique, qui est par définition un sprint de 40 minutes.
"Je pense que nous devons trouver de nouvelles idées. L’année prochaine, par exemple, nous aurons 42 courses. Ce sera intense, pour toute l’équipe, mais surtout pour les pilotes. Mais je suis convaincu que les courses Sprint attireront davantage l’attention."
"Je pense que le vendredi sera également plus intéressant, peut-être pas autant pour le public ordinaire, mais pour les vrais fans. En MotoGP, nous proposons 40 minutes explosives et spectaculaires, mais à part cela, il n’y a pas grand-chose."
"En Formule 1, on voit beaucoup plus de préparation : la préparation de l’événement, et l’événement en lui-même, dans lequel le facteur stratégie compte. Cela n’existe pas en MotoGP, à moins que nous ayons une course flag-to-flag."
Les communications radio comme clé du succès ?
Ces dernières sont les courses perturbées par la pluie, qui se gèrent de manière plus complexes que les courses classiques. Hormis cela, toute course de MotoGP est un Sprint, et Rivola n’est pas certain que cela ait une véritable valeur ajoutée.
L’Italien note également que le montage de Drive to Survive dépend énormément - avec une certaine malhonnêteté, il faut l’admettre - des communications radio, qui n’existent pas en MotoGP : "Les messages radio sont très importants pour offrir plus de spectacle."
"Même si je ne suis pas convaincu, car je pense que c’est dangereux pour les pilotes, nous devons trouver un moyen d’introduire cela en MotoGP. Une possibilité pourrait être que seul le pilote puisse parler, afin de ne pas être dérangé."
"Quelque chose que le pilote dit est peut-être super important et les gens y prêteraient plus d’attention. Je pense que nous devrions considérer le business et le spectacle en MotoGP d’un autre point de vue. Il ne s’agit pas de copier ce que fait la Formule 1, mais de se demander pourquoi ils ont plus de succès que nous."