La championne de la F1 Academy, c’est elle ! Abbi Pulling (soutenue par Alpine) a en effet remporté, devant Doriane Pin qui n’a cependant pas démérité, le championnat féminin organisé par la FIA et la FOM, afin de promouvoir la diversité dans le sport auto.
La championne reste cependant réaliste. La F1, malgré cette victoire, restera encore un rêve lointain. Voire très lointain puisque l’an prochain, elle ne courra « que » en GB3 Series, avec Rodin, au Royaume-Uni.
« Je vise toujours la Formule 1 et je pense que si nous voyons une femme y arriver, ce ne sera pas une entrée à la Max Verstappen, à 17 ans, » a déclaré ainsi Abbi Pulling (21 ans) à Reuters après avoir remporté son titre.
Pulling parle crûment sur les limitations que rencontrent les femmes encore dans le sport auto.
« Une fille de 16 ans ne serait pas assez forte pour conduire une Formule 2. C’est la dure réalité. »
« Avec un physique féminin plus mature et plus développé, il sera davantage possible de conduire cette voiture et de se battre pour une opportunité d’accéder à la Formule 1. Quand, et non si, nous verrons une femme en Formule 1, elle sera plus âgée – probablement au milieu de la vingtaine, je dirais. »
La Formule 1 n’a plus vu de femme concourir en Grand Prix (le dimanche), depuis l’Italienne Lella Lombardi en 1976.
Mais il n’y a pas que le physique qui bloque. Il y a également un facteur fondamental pour Pulling.
« L’argent. »
« Les garçons commencent à s’entraîner à 14 ans dans tous les pays et en Europe. Ensuite, ils font les championnats italiens, allemands et émiratis de F4, ce qui coûte à lui seul un million – et cela alors qu’ils ont 15 ou 16 ans. »
« Ils le font pendant deux ans... puis ils passent à la FRECA (Formula Regional Europe) ou au GB3, parfois même les deux. Ensuite, ils font 30 à 40 journées d’essais à ce niveau-là. Si je pouvais me permettre de faire cela, oui, je le ferais et je continuerais contre les garçons. »
« Malheureusement, dans ma situation, je ne peux pas faire cela. C’est là que la F1 Academy a été si importante. Elle ne devrait pas être nécessaire, mais elle l’est. C’est la triste réalité. J’espère qu’elle continuera longtemps et continuera à donner des opportunités aux filles dans ma situation. »
Pulling, financée par son père ingénieur, avait dû quitter le championnat britannique de F4 en 2021 lorsque l’argent venait à manquer.
« Nous vivons confortablement, mais dans le contexte du sport automobile, nous en sommes très loin, » a-t-elle admis. « Nous n’avons pas des dizaines ou des centaines de milliers d’euros, encore moins des millions. »
« Sans ces deux championnats (W Series et F1 Academy, où les volants sont financés, ndlr), je ne serais pas là aujourd’hui. C’est certain. Je leur serai à jamais reconnaissante, ils ont gardé mon rêve en vie. »
La popularité croissante de la F1, portée par le documentaire Netflix « Drive to Survive », a attiré de plus en plus de jeunes filles vers le karting et des initiatives se multiplient pour encourager leur participation. Le vent est enfin devenu favorable pour les femmes en F1, et Pulling en a conscience.
« C’est un moment incroyablement positif pour être une femme dans le sport, » affirme-t-elle avec optimisme. « Tant que je performe, je suis confiante qu’avec le système de soutien autour de moi, je pourrai continuer à grimper les échelons. »