Jacques Villeneuve n’a pas raccroché son casque : le Canadien et consultant de Canal + entend participer aux Daytona 500, qui se tiendront le mois prochain ; mais d’abord, il faut qu’il se qualifie (ce qu’il avait échoué à faire en 2008).
En dehors de la piste plus que sur elle, Villeneuve apparaît toujours comme un trublion du sport, un peu rebelle, un peu obstiné ; qui ne laisse en tout cas pas indifférent.
Et comme son ancien ingénieur de course Jock Clear (aujourd’hui chez Ferrari) l’a confié au podcast "Beyond the Grid", cette réputation de Villeneuve ne date pas d’hier : dès son passage chez Williams, Villeneuve ne laissait pas de marbre les froids Frank Williams et Patrick Head…
« J’ai aimé le fait qu’il soit un peu rebelle. »
« Il faut voir ça dans le contexte de Williams. Williams était, et est toujours, une équipe fantastique, une équipe dans le vrai sens du terme. Tout ce qui concerne le travail chez Williams, tournait cependant autour de Frank [Williams] et Patrick [Head]. »
Le caractère de Villeneuve pouvait-il donc vraiment convenir à l’équipe de Grove selon Clear ?
« Beaucoup de gens disent que Williams n’a jamais bien traité ses pilotes. »
« Je ne pense pas que vous trouverez un pilote qui n’aura jamais beaucoup de plaintes de leur passage chez Williams. Ils trouveront des occasions où ils diront, ’Oh ouais, Frank a dit ça’, ou, ’Patrick avait l’habitude de faire ça’, ou, ’Il n’avait aucun respect pour moi’. »
« Mais en fait, si vous leur demandez, "Avez-vous apprécié votre temps chez Williams ?" Absolument, ils ont vraiment apprécié. Mais tout tournait autour de Frank et Patrick. »
« A tel point que les pilotes étaient vraiment opprimés à certains moments. Je n’étais pas là quand Alain Prost était là, et peut-être que c’était très différent avec un pilote de son calibre, mais j’étais certainement là avec Damon Hill, et il a lutté pour se faire entendre parfois. »
« Jacques est arrivé comme un jeune garçon sans véritable palmarès, à part avoir gagné Indy, ce qui est un sacré palmarès mais, en Europe, ça ne compte pas. »
« Patrick avait très peu de respect pour le fait qu’il avait gagné l’Indy 500 et le championnat IndyCar. »
« Je ne veux pas dire dans des domaines où il ne devrait pas être impliqué, juste dans ce dont il avait besoin quand il conduisait la voiture. "C’est comme ça", "J’ai besoin de ça", "Je pourrais faire avec ça". On ne l’entendait pas. »
En vérité, l’opposition entre Villeneuve et Head semble s’être située sur un point précis, qui est un emblème de la différence de caractère entre les deux hommes : Clear raconte que Villeneuve avait considérablement rapproché les pédales dans son cockpit, ce qui avait provoqué l’ire de Head.
« Tout était excentrique. »
« De nos jours, la plupart des pilotes ont une course de l’accélérateur de 50 à 70 millimètres. C’est donc au niveau de la pointe du pied que vous vous trouvez, à ces 50 à 70 millimètres. Le plus court que je connaisse est d’environ 45 [millimètres]. »
« Jacques avait choisi 22 millimètres ! 22 millimètres, ce n’est rien. Mais si c’est plus long que ça, il disait : Non, cette pédale d’accélérateur est beaucoup trop longue. Je ne peux pas conduire ça ! »
« Patrick se disait : Mais qu’est-ce que fait cet idiot ? Est-ce qu’il comprend comment fonctionne une voiture de course ? Mais Jacques n’en disait rien, il répondait "Je me fiche de ce que dit Patrick". »
Mais conclut Clear, l’estime de Head pour Villeneuve était, au moins sur le moment, réelle pour son pilote.
« Ne vous méprenez pas, Patrick aimait avoir Jacques dans l’équipe. »
« Il vous dira maintenant que Jacques n’était pas un très bon pilote de course et qu’il a même failli gâcher un championnat avec une très bonne voiture, mais il ne le pense pas vraiment. »
« Il a apprécié cette dynamique, c’est certain, parce qu’il aime crier sur les gens. Et Jacques lui a donné beaucoup de raisons de crier ! »