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Que révèle la lettre de la FOPA contre Liberty ?

Et que cache-t-elle ?

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La lettre a fait l’effet d’une douche froide pour Liberty Media : l’association des promoteurs des Grands Prix en F1 (la FOPA, pour Formula One Promoters Association), qui regroupe 16 des 21 promoteurs, a vivement attaqué le bilan et la vision de Liberty pour la F1.

Selon la FOPA, les Américains conduisent en effet le sport dans la mauvaise direction, sur plusieurs points, clairement mentionnés dans la lettre en question.

Tout d’abord, Liberty Media privilégie, comme d’ailleurs Bernie Ecclestone en son temps, les diffusions sur des chaînes payantes, à l’image de Canal + en France. De ce fait, si les rentrées d’argent augmentent, c’est au prix d’une baisse des audiences en termes absolus. A terme, les promoteurs craignent ainsi que la F1 devienne un sport bien moins attractif et populaire – et il y aurait donc moins de monde dans les tribunes.

La FOPA pointe d’autres points de désaccord. Les promoteurs ont, par exemple, très peu apprécié que Miami se voie proposer un contrat « gratuit » (sans paiement de droits d’inscription) pour les prochaines années – alors que les circuits doivent, normalement, payer rubis sur l’ongle des millions d’euros (24 pour Monza). Ce « deux poids deux mesures » est évidemment inacceptable pour tous les lésés.

D’autre part, l’extension du calendrier à 22 puis 25 courses, objectif affiché de Liberty Media, inquiète forcement les promoteurs de la FOPA. Ainsi, si un Grand Prix est organisé à Miami, celui d’Austin, à deux heures trente d’avion, perdra forcément des spectateurs. En tout état de cause, le contrat gratuit de Miami semble être la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

Aux facteurs ouvertement affichés par les promoteurs, il faut encore en rajouter plusieurs, non explicitement mentionnés. Sean Bratches (le responsable des relations avec les promoteurs) a par exemple, à plusieurs reprises, rappelé que les frais d’inscription pour les circuits ne baisseraient pas à l’avenir, la F1 privilégiant une démarche de qualité à l’objectif de réduction des coûts. Cette vision nécessite une augmentation générale des revenus de la F1… or, à moyen terme, les promoteurs n’ont plus confiance dans Liberty Media pour y parvenir.

Tous ces facteurs sont des motifs d’inquiétude bien légitimes pour la FOPA. Mais ces 16 promoteurs ont-ils pour autant raison sur toute la ligne ? Défendent-ils véritablement l’intérêt général de la F1 ?

En effet, l’initiative politique de la FOPA peut être également critiquée sur plusieurs points. La FOPA avance plusieurs arguments, mais en tait d’autres, beaucoup plus intéressés.

Pour bien remettre en perspective la lettre, il faut d’abord garder à l’esprit qu’elle a été écrite par Stuart Pringle, le promoteur de Silverstone. Or, Silverstone a dénoncé son contrat le liant avec la FOM, provoquant une réaction hardie de Liberty Media, qui a tout de suite promu l’éventualité d’un Grand Prix à Londres : évidemment, Pringle a vu rouge.

De plus, les contrats de plusieurs circuits, comme celui de Monza, arrivent bientôt à échéance : la lettre de la FOPA tombe ainsi à point nommé pour mettre la pression sur Liberty Media. Sans aucun doute, Pringle cherche à obtenir des millions de rabais pour lui et ses camarades coalisés.

Les promoteurs défendent aussi, dans une certaine mesure, des intérêts particuliers, qui ne rejoignent pas forcément l’intérêt général de la F1. De ce fait, certaines de leurs prises de position sont incohérentes. Prenons l’extension du calendrier, à 25 courses : elle a pour but de conquérir de nouveaux marchés, de renforcer la popularité de la F1, et d’augmenter ainsi les revenus du sport ; or l’augmentation des revenus de la F1 est une exigence proclamée par la lettre de la FOPA. Soutenir l’extension du calendrier serait ainsi une position cohérente, puisqu’elle participe du même but d’augmentation des revenus… mais évidemment, les promoteurs ont tout intérêt à ce que le calendrier soit le plus resserré possible.

Il faut ainsi garder à l’esprit qu’en tant qu’association d’intérêts, la FOPA défend des intérêts bien compris. Mais au-delà de ce constat, la lettre est aussi éclairante par ce qu’elle dévoile sur la confiance portée à Liberty Media par les acteurs du monde de la F1.

La lettre de la FOPA signe en effet, peut-être, définitivement la fin de l’état de grâce pour Liberty Media. Alors que les Américains avaient enchaîné les succès depuis 2016, en rompant avec l’ère Ecclestone, les doutes se sont depuis accumulés. Le règlement 2021, sur les budgets plafonnés, ne voit toujours pas le jour, bien que le temps presse ; les accords Concorde sont toujours en suspens ; et, à plus court terme encore, le règlement 2019, directement initié par Liberty Media, a suscité de plus en plus de scepticisme de la part des directeurs d’écurie et directeurs techniques.

La FOPA profite ainsi du fait que Liberty Media soit en partie affaiblie ces dernières semaines. La manœuvre, bien sentie politiquement, a donc semble-t-il atteint son but : Chase Carey aurait « accusé le coup » selon plusieurs sources. Et aurait même évolué sur sa position selon Stuart Pringle, le promoteur de Silverstone, qui mène la FOPA. « Nous avons toutes les indications selon lesquelles le message a été bien reçu. Nous étions frustrés de ne pas avoir d’autre option que celle de diffuser un communiqué pour être entendus. Mais au final, la dernière réunion a été très positive » a en effet déclaré Pringle.

La lettre de la FOPA traduit certes l’affaiblissement réel de la confiance portée à Liberty Media par tous les acteurs de la F1. Il n’en demeure pas moins qu’elle cache, comme souvent en F1, beaucoup de politique et d’intérêts particuliers.

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