De nouvelles informations commencent à apparaître, concernant l’infraction « mineure » de Red Bull sur le respect des budgets plafonnés, sur l’année 2021.
La fête de Suzuka un peu ternie ?
Des informations sur la forme tout d’abord : il apparaît que Red Bull a été prévenue par la FIA du dépassement commis… une heure seulement après l’arrivée du Grand Prix du Japon, lors duquel Max Verstappen a obtenu son titre mondial.
C’est Shaila-Ann Rao, la Secrétaire générale par intérim de la FIA, et ancienne proche conseillère de Toto Wolff, qui aurait passé un coup de fil à Christian Horner une heure après l’obtention du titre.
De quoi donner un goût plus amer au Moët & Chandon !
Quatre ‘zones grises-noires’ pour un total de 5,8 millions de dollars
Sur le fond, ensuite. Plusieurs sources concordantes venant notamment du Royaume-Uni, indiquent que c’est dans une série de 4 domaines au total, que Red Bull aurait commis lesdites infractions.
Le total du dépassement se chiffrerait à 1,8 million de dollars, bien en-dessous du seuil de 5 % (7 millions de dollars) séparant les infractions mineures des infractions significatives.
Dans les plans soumis par Red Bull à la FIA, initialement, l’équipe de Milton Keynes assurait être 4 millions de dollars en dessous du plafond (fixé à 145 millions de dollars).
Cependant, la FIA n’a pas eu les mêmes méthodes de calcul budgétaire dans une série de 4 domaines, qui ont fait basculer Red Bull au-delà du plafond, pour 1,8 million de dollars. Le calcul est donc ainsi fait : 5,8 millions de dépenses recomptabilisées par la FIA - 4 millions de ’marge’ de Red Bull = 1,8 million de dollars de dépassement.
Dan Fallows, une mutation qui fait parler
Premier domaine à être concerné : les coûts de fonctionnement interne, liés aux congés maladie et aux périodes de réserve et préavis, ou ‘gardening leave’ en anglais. Le total des sous-estimations dans ce champ s’élèverait à 800 000 dollars selon la FIA.
Un ‘gardening leave’ arrive dans une situation précise : quand un employé important va rejoindre une autre équipe prochainement, son écurie de F1 continue à le payer, à le garder sous contrat et donc sous contrôle… mais sans l’inclure dans le développement et le travail quotidien de l’équipe, de peur qu’il révèle ses secrets à sa future écurie dans quelques mois. D’où le terme anglais : l’employé peut aller faire du ‘jardinage’ pendant ce temps !
Cette année, un ‘gardening leave’ a concerné, chez Red Bull, Dan Fallows, responsable de l’aérodynamique qui était en partance chez Aston Martin F1. Il a donc été placé en ‘gardening leave’ logiquement. Et c’est là que le bât blesse.
Car il apparaît que Dan Fallows et son lourd salaire auraient été rebasculés vers l’entité Red Bull Advanced Technologies (hors plafond car hors équipe de F1), et non Red Bull Racing (l’équipe de F1). Alors qu’auparavant effectivement, Fallows était bien payé par l’équipe de F1. Une ‘mutation’ qui arrangeait bien les comptes de Red Bull. Mais la FIA a donc réintégré le salaire de Fallows dans les comptes de l’équipe de F1.
Le recrutement de Fallows par Aston Martin F1 aurait donc eu des répercussions en chaîne ! Mais Red Bull pourra aussi arguer que de toute manière, Fallows n’aurait jamais pu travailler sur la F1 2022. On comprend ainsi pourquoi Red Bull persiste à ne pas ‘admettre’ avoir dépassé les budgets plafonnés, si une des raisons principales se nomme Fallows, un homme compté dans les budgets plafonnés qui de toute manière n’aurait pas travaillé pour la F1 de Milton Keynes.
Chaque camp a de bonnes raisons pour plaider sa cause ici. Le flou juridique est de taille et nul doute qu’il s’agira d’un point de discorde durable entre la FIA et Milton Keynes. En attendant, alors que l’on pensait que c’était le statut de Newey comme consultant qui faisait débat, le ‘coupable’ s’appellerait non Adrian, mais Dan.
Les autres infractions relevées par la FIA
Le deuxième domaine de dépassement a fait beaucoup sourire, mais il est massif : les frais de bouche, buffet et autres frais de restauration. On parle ainsi d’une sous-estimation par Red Bull d’1,2 million de dollars !
Red Bull aurait proposé des repas gratuits à ses employés à la cantine de Milton Keynes – la FIA estimant que ces repas devaient être décomptés.
Troisième champ de discorde entre Red Bull et la FIA : l’utilisation des pièces de rechange et transposées d’une année à l’autre (pour un montant non chiffré).
Le règlement financier dit ceci : les pièces de la F1 2021 rebasculées sur la voiture 2022 (car il y en a tout de même) sont comptées dans les budgets plafonnés depuis juin, selon des modalités qui ont été justement précisées il y a quatre mois. Avant juin, ces pièces ‘recyclées’ faisaient partie des exceptions au total des budgets plafonnés. La règle est donc devenue plus stricte mais Red Bull aurait peut-être joué avec son interprétation…
Enfin, la dernière infraction supposée concernait la situation fiscale de Red Bull et s’élèverait à 1,4 millions de dollars environ.
On parlerait ici d’un crédit d’impôt décompté à tort : plus concrètement, le Research and Development Expenditure Credit (RDEC), plus ou moins similaire au Crédit Impôt Recherche en France (CIR), soit la déduction de frais de recherche R&D. Ce crédit d’impôt pour des entreprises dépensant beaucoup en R&D (comme Red Bull on l’imagine) peut être utilisé pour se débarrasser de certaines dettes fiscales.
Red Bull aurait attendu plus de clarté sur ce point, mais le débat n’aurait pas vraiment pu être tranché par la FIA… Ce qui pourrait arranger les affaires de Milton Keynes : si effectivement Red Bull s’était montrée de bonne foi en attendant une clarification de la FIA qui ne serait jamais arrivée, la Fédération pourrait se montrer plus clémente. D’autant plus qu’Aston Martin F1 serait en infraction de procédure selon la FIA pour la même raison.
Horner annule une conférence de presse pour s’entretenir avec Ben Sulayem
En somme, Red Bull aurait commis quatre séries de mésinterprétations, qui mises bout à bout, auraient abouti à des différences de calcul de plus de 5,8 millions de dollars – alors que l’équipe avait donc calculé être 4 millions de dollars en-dessous du plafond initialement.
La FIA a proposé à Red Bull un accord (encore confidentiel) selon une procédure de plaider-coupable pour clore l’affaire. Mais Red Bull ne voudrait justement pas plaider coupable, ne digérant possiblement pas le traitement du cas Fallows. L’affaire pourrait donc se régler devant le tribunal de la FIA.
Ces quatre infractions, même si leur importance est notable (5,8 millions de dollars, moins les 4 de ‘marge’ de Red Bull), ne seront possiblement pas de nature à priver Max Verstappen de son titre mondial. Mais si Red Bull était de nouveau placée en infraction cette année, gare à la récidive…
Le paddock aurait pu en savoir plus lors d’une conférence de presse dédiée de Christian Horner, avant les EL1 à Austin… Mais Red Bull vient de faire savoir qu’elle serait normalement annulée : Christian Horner préfère s’entretenir avec Mohammed Ben Sulayem auparavant !