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Sir Frank Williams, l’artisan devenu légende de la F1

L’emblématique propriétaire est décédé

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La Formule 1 a été choquée d’apprendre ce dimanche le décès de Sir Frank Williams, fondateur de l’équipe Williams F1. Le Britannique avait souffert de problèmes de santé ces dernières années et était à l’hôpital depuis vendredi.

Il laisse derrière lui un héritage immense, à commencer par l’équipe Williams F1, qui porte toujours son nom bien que Dorilton Capital l’ait rachetée l’année dernière, évinçant définitivement la famille Williams, et notamment la fille de Frank, Claire.

Frank Williams était né en 1942 et avait débuté la compétition automobile en 1961, à l’âge de 19 ans. Très rapidement, le Britannique reconnut qu’il était plus à l’aise à gérer les affaires en coulisses, et notamment le management de pilotes.

Dès 1966, il fonda sa première structure, Frank Williams Racing Cars Ltd, pour préparer des châssis de F3 et F2. Il fit courir dès cette année-là son ami Piers Courage, dont il gérait la carrière depuis plusieurs années. D’autres jeunes pilotes passèrent dans sa structure dans les mois et années suivants.

Le grand saut de la F1 pour le jeune artisan Williams

En 1969, Frank Williams décida d’acheter une Formule 1 à Brabham pour engager un châssis équipé du moteur Cosworth DFV. Ces premiers pas furent encourageants mais en 1970, il céda aux sirènes du constructeur De Tomaso, une grosse erreur.

La saison 1970 vit le décès de son ami Piers Courage dans une de ses voitures, et les performances ne furent absolument pas au rendez-vous. En 1971 et 1972, Frank Williams décida d’engager des March privées.

En 1973, l’équipe eut enfin son premier châssis officiel. Il fallut attendre 1975 pour qu’une monoplace de Formule 1 soit engagée avec le nom de châssis Williams.

En bout de course avec une équipe en difficulté et sans argent, Williams accepta finalement de vendre son équipe en 1976 à Walter Wolf, d’abord en partie, puis totalement. La même année, Wolf évinça Frank Williams pour que l’équipe porte son nom.

Les mois qui suivirent furent l’occasion pour Frank Williams de fonder une toute nouvelle structure, avec son associé Patrick Head. En 1977, la structure engagea une March, avant de se relancer dans la fabrication de châssis en 1978.

Première victoire puis premier titre mondial pour Williams

L’année 1979 fut celle de la réussite pour Frank Williams, dont l’équipe remporta cinq victoires, une première par Clay Regazzoni, suivie de quatre succès pour Alan Jones. L’Australien allait faire encore mieux en 1980 en remportant le titre mondial.

En 1981, Williams perdit le titre pilotes à cause de sa mauvaise gestion du duo composé de Jones et Carlos Reutemann, mais elle gagna le championnat constructeurs.

En 1982, Keke Rosberg remporta le titre mondial au volant d’une Williams. Les années suivantes virent l’arrivée de Honda comme partenaire de l’équipe, qui abandonna enfin le moteur Cosworth.

L’équipe continua à s’affirmer dans le paysage de la Formule 1, avec un succès en 1983, deux en 1984 et quatre victoires durant la saison 1985. Mais l’année 1986 fut la première durant laquelle Williams et Honda jouèrent le titre.

Nigel Mansell et Nelson Piquet cumulèrent neuf victoires, manquant le titre de peu derrière Alain Prost. Mais Williams fut championne du monde, dans des circonstances pourtant dramatiques en interne.

En effet, c’est pendant l’année 1986 que Frank Williams eut un terrible accident de voiture, en revenant d’une séance d’essais au Castellet. Gravement touché aux vertèbres, il passa plusieurs semaines à l’hôpital et ne remarcha jamais.

Il revint toutefois assister au titre constructeurs de son équipe en fin de saison. Outre les titres mondiaux, il décrocha cette année-là une distinction hors de la compétition automobile, puisqu’il devint Sir Frank Williams.

L’équipe Williams F1 décroche le Graal avec Honda

La saison 1987 fut celle de tous les succès, avec de nouveau neuf victoires, mais surtout le titre mondial pour Piquet et pour Williams F1 chez les constructeurs. Malheureusement, elle fut aussi celle du départ de Honda, qui rejoignit McLaren à partir de la saison 1988.

Après une année de vaches maigres en 1988, l’association avec Renault l’année suivante fut immédiatement une réussite. Le duo remporta deux victoires en 1989, le V10 français s’avérant bien plus performant que le vieux V8 Judd de 1988.

En 1991, sept succès vinrent couronner le retour au premier plan de Williams, qui dut néanmoins s’incliner face à Ayrton Senna et McLaren dans les deux championnats, en dépit des belles performances de Mansell et Riccardo Patrese.

Cette année marqua surtout les premiers travaux d’Adrian Newey en tant que designer dans l’équipe Williams F1. L’ingénieur débuta une série de monoplaces victorieuses, et le résultat se vit dès l’année suivante.

En 1992, Williams écrasa la concurrence avec dix victoires (une pour Patrese) et 15 pole positions (une pour Patrese). Mansell fut logiquement champion du monde, sans contestation possible, mais se brouilla avec Sir Frank Williams et quitta l’équipe pour aller relever le défi de l’Indy Car World Series, avec succès.

Pour le remplacer, Williams recruta Alain Prost, qui venait de passer une année sur le banc de touche et souhaitait faire son retour en Formule 1. Le bilan fut le même, avec 10 victoires et 15 pole positions, et Prost et Williams étrillèrent la concurrence pour remporter les deux titres.

De nombreux titres mais un drame dans les années 90

En 1994, Sir Frank réalisa un de ses rêves en tant que patron d’écurie et recruta Ayrton Senna pour remplacer Prost, parti en retraite définitive. Le Brésilien avait fait ses premiers tours de roue en F1 grâce à Williams, qui l’avait fait rouler en 1983.

Onze ans plus tard, ils étaient réunis et Senna avait pour mission de poursuivre la moisson de titre débutée deux mois plus tôt. Malheureusement, le pilote se tua à Imola lors de leur troisième course commune, ce qui marqua énormément le propriétaire du team.

Outre l’inculpation pour homicide involontaire qu’il dut subir en compagnie de Patrick Head et Adrian Newey, qui se conclut par un acquittement général, le décès du Brésilien marqua fortement Sir Frank moralement.

Les saisons 1994 et 1995 furent compliquées, avec le spectre du décès de Senna au-dessus de l’équipe, et un Damon Hill peu à l’aise dans son rôle inattendu de leader de l’équipe britannique, face à Benetton et Michael Schumacher.

En 1996, avec un duo châssis-moteur redoutable, Hill et Williams F1 retrouvèrent les titres mondiaux, bien aidés par le redoutable Jacques Villeneuve, un rookie très performant dans la monoplace championne du monde.

Le même Villeneuve prit le relais de Hill en 1997 pour remporter à nouveau le titre mondial. De manière incompréhensible, Williams avait refusé de relever le salaire de Hill après son titre, et les discussions s’étaient conclues par le départ du Britannique, remplacé par Heinz-Harald Frentzen.

Mais ce départ causa aussi celui de Newey, furieux de ne pas avoir été consulté pour cette décision, alors qu’il voulait justement avoir son mot à dire pour le choix des pilotes. Et dans la foulée, Renault se retira officiellement de la Formule 1, laissant Williams composer avec un moteur privé Mécachrome puis Supertec.

Des années 2000 décevantes avec BMW, Cosworth et Toyota

La fin de l’ère du V10 français se fit dans la douleur, et Williams F1 retrouva un partenaire constructeur en 2000, avec l’arrivée de BMW dans la catégorie. Aussi performant que fut le moteur, le manque de fiabilité et les bourdes des pilotes ne permirent jamais à cet ensemble de glaner les couronnes.

En 2003, Juan Pablo Montoya manqua le titre de peu, mais la période avec BMW fut globalement décevante. Souhaitant racheter l’équipe, le constructeur allemand se heurta au refus de Sir Frank, et la brouille conduisit à la séparation entre l’équipe et son motoriste.

Le V8 Cosworth qui remplaça le V10 BMW n’avait rien de comparable, et l’équipe sombra dans le classement. Hormis une quatrième place en 2007, Williams ne fit jamais mieux chez les constructeurs qu’une sixième position entre 2006 et 2013.

Neuvième en 2011 et 2013, l’équipe connut de nombreux changements avant le début de l’ère du V6 turbo hybride. Sir Frank Williams céda les rênes de son équipe à sa fille Claire, qu’il avait préparée à sa succession dans les mois précédents.

De plus, l’équipe abandonna le moteur Renault pour un V6 hybride Mercedes, un choix très inspiré compte tenu de la domination du constructeur allemand dès le début de la période turbo hybride.

Une deuxième descente aux enfers

Frank se fit de plus en plus discret dans l’équipe, et on le vit de mois en moins dans le garage et dans le paddock de la F1. Il assista de loin à la deuxième descente aux enfers de son équipe, troisième en 2014 et 2015, mais dernière du championnat en 2018 après une saison catastrophique.

C’est finalement en septembre 2020 que la famille Williams a revendu l’équipe, à une période où l’on ne voyait déjà plus Sir Frank dans le paddock. Sa fille claire fut lourdement critiquée, mais l’équipe n’est simplement pas parvenue à prendre les virages réglementaires successifs des années 2000 et 2010.

La raison à cela fut notamment un budget limité, ses sponsors du milieu des années 2000 ayant décidé de partir après la désastreuse ère Cosworth. L’arrivée de Martini en 2014 avait permis à l’équipe de retrouver une situation saine, mais elle retomba vite en difficulté et dut laisser le contrôle à Dorilton Capital.

Le consortium a promis de conserver le nom Williams en F1, expliquant être conscient de l’héritage qu’il a acquis en même temps que l’équipe. Après le décès de Sir Frank Williams ce jour, on espère d’autant plus que son nom perdurera en Formule 1 pendant encore de nombreuses années.

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