Comme les autres teams, Pescarolo Team Autovision va faire sa rentrée en compétition le a semaine prochaine lors des Six Heures de Silverstone, quatrième manche des Le Mans Series - et cinquième de l’Intercontinental Le Mans Cup. Henri Pescarolo nous a reçu aujourd’hui au Technoparc. Nous avons croisé un autre habitué des 24 Heures du Mans, mais motos, celles-ci, Gérard Jolivet, le recordman des participations à des courses de 24 Heures Moto avec 25 24 Heures du mans, 25 Bol d’Or et 4 24 Heures de Spa, venu rendre visite à un autre grand spécialiste de l’endurance.
Claude Foubert : Henri, que s’est-il passé chez Pescarolo depuis Imola ?
Henri Pescarolo : « Après Imola, tout le monde est parti en vacances. Pour une fois, il n’y avait pas de courses au mois d’août, et j’en ai profité. Les gars l’avaient bien mérité, car ils ont bien travaillé, avec une somme de travail colossale depuis que nous sommes repartis de presque zéro. J’ai donc profité de cette longue interruption pour fermer l’atelier pendant quinze jours et ainsi me mettre en conformité avec la législation du travail en ce qui concerne les congés et les récupérations. »
La règlementation a quelque peu évolué depuis Imola, les modifications sont-elles déjà faites ?
« Oui, la planche sous la voiture doit maintenant faire 25mm au lieu de 20, et donc nous avons réglé tout ça avant de partir en vacances. Pour ce qui des persiennes à l’avant, nous n’avons rien eu à faire, la voiture était déjà en conformité avec la nouvelle réglementation. »
Cette nouvelle épaisseur de la planche modifie-t-elle beaucoup le comportement de la voiture ?
« Oui, car l’effet de sol est sensiblement moindre, et il faut adapter les réglages en conséquence. »
Quel est le programme avant Silverstone ?
« On termine la préparation de la voiture. Lundi prochain, on va faire un déverminage au Mans sur le circuit de Maison-Blanche. C’est Manu Collard qui fera ce déverminage. La voiture et les mécanos partent mercredi pour Silverstone, et moi je pars jeudi prochain. »
L’objectif de la fin de saison, c’est bien sûr les titres pilotes et teams ?
« Effectivement, c’est ce que nous visons. Pour le titre constructeurs, avec une seule voiture, c’est beaucoup plus compliqué par rapport aux deux Lola-Toyota. A Silverstone, cela va être à nouveau compliqué comme la course est aussi une manche de l’ILMC et que l’attribution des points n’est pas séparée. Avec quatre diesels au départ, l’objectif ce sera la cinquième place. Les OAK-Pescarolo, avec deux voitures bien conduites, seront, je l’espère, des alliées en s’intercalant entre nous et les Lola Toyota. A Silverstone, la voiture devrait être très bien et je pense qu’en fait tout se jouera à Estoril. Il faudra se méfier aussi de la Lola Aston Martin, même si elle va faire sa première course en 2011, car en ALMS un modèle identique marche très bien. »
A Silverstone, il vaut mieux avoir un proto ouvert ou fermé ?
« A Silverstone, ça n’a pas d’importance. Si tu poses la question à un ingénieur pour la saison complète, il va te répondre qu’un proto fermé est plus avantageux parce qu’il y a Le Mans et que là, l’aéro est plus efficace, mais à Silverstone, le jeu est égal, avec peut-être même quelques petits inconvénients pour les proto fermés : problèmes éventuels de pare-brise, visibilité latérale... »
"Pour revenir un peu sur les équivalences diesel-essence, le regret de tous les possesseurs de voitures « Essence », c’est qu’après Spa, on nous avait promis des changements au niveau des ravitaillements. Les diesels devaient en principe perdre vingt-deux secondes sur les « Essence ». Cela avait suscité un peu d’espoir, mais en fait elles ne perdent pas vingt-deux secondes, mais trois seulement. Donc, rien de changé, ça fait maintenant sept années consécutives. Nous allons attendre 2012. Je crois qu’il faut que cela change, car il en va de la survie de plusieurs constructeurs. Il n’est pas question de pouvoir battre Audi ou Peugeot, car ils ont des capacités de budget et de recherche que nous n’avons pas, mais il faut que l’écart reste dans des proportions acceptables, ce qui n’est pas le cas actuellement de manière évidente. C’est dur de démarcher des partenaires en leur disant qu’on va se battre pour la septième place... »
Où en es-tu pour 2012 ?
« Je suis déjà en plein dedans. L’année prochaine, c’est maintenant qu’elle se prépare. Je travaille sur l’hypothèse qu’on va vers des équivalences plus équitables. Je pense qu’avec l’apport de la Commission Technique de la FIA, en collaboration avec l’ACO, ce sera mieux. D’autre part, je regarde dans la direction de la règlementation 2014 qui devrait faire que les protos soient à ce moment-là très différents des modèles actuels. Donc, dans ces conditions, c’est pratiquement impossible de mettre en chantier une nouvelle voiture dont la carrière serait terminée dès la fin 2013.
Donc, je m’emploie à trouver le budget nécessaire pour le Championnat d’Endurance 2012. Si j’y parviens, nous avons de nombreuses solutions dans nos cartons pour faire évoluer considérablement la voiture, pour la rendre différente de ce qu’elle est aujourd’hui. »
As-tu déjà choisi le moteur ?
« De toute façon, il faut que j’en change, je ne peux pas conserver le 5,5 litres. Donc, ce sera un 3,4 litres. Je regarde un peu ce qui se fait. Ceci dit, j’ai d’excellentes relations avec Judd et je suis content de leurs moteurs. »
5,5 litres ou 3,4 litres, ça change beaucoup ?
« Au niveau de la puissance, non. Avec les brides actuelles, Judd nous a fourni les courbes et la puissance est équivalente. En revanche, le V10 est plus petit, plus léger, et ça permet une répartition des masses différentes, avec une entretoise plus longue. »
Tu parlais d’évolutions importantes possibles sur la voiture. Aérodynamiques, mécaniques ?
« Si on part du principe que les équivalences seront plus favorables, il faut que le châssis soit à la hauteur. On ne peut pas toucher à la coque, avec le changement de motorisation, on peut faire quelques modifications mais c’est surtout sur l’avant qu’il faut travailler. C’est l’avant qui fait marcher la voiture, et là il y a beaucoup à gagner, nous avons des solutions pour faire évoluer tout ça. Évidemment, il faut le budget. L’idéal, ce serait d’avoir deux voitures, car c’est la première année où je n’en fais courir qu’une. Donc, je travaille là-dessus. »
Les partenaires actuels sont-ils partants pour 2012, d’autres arriveront-ils ?
« Cela fait partie du travail actuel. Les décisions des entreprises se prennent en septembre , donc on en saura plus à la fin du mois prochain. Il le faudrait pour pouvoir débuter les études, la recherche, les essais en soufflerie puis les essais sur piste. »
Pour 2014, on parle d’une même quantité d’énergie attribuée à chacun... ?
« Oui, et je pense que c’est une meilleure garantie pour avoir des équivalences véritables, sachant que nous aurons probablement des technologies très différentes, avec l’hybride, etc. Sachant qu’il faudra certainement avoir un moteur avec récupération d’énergie, ma préoccupation, ce sera d’avoir un partenariat moteur.
Peut-être qu’à l’avenir, les moteurs de F1 et les moteurs d’endurance se rapprocheront et qu’on reviendra peut-être à une époque où les moteurs Matra ou Ferrari couraient indifféremment en Endurance ou en F1. Il faut quand même noter un point très positif : l’ACO et la FIA ont eu une approche intelligente et constructive dans leur rapprochement, en tirant en trait sur le passé et sur le passif. Il faut rendre crédit à l’équipe actuelle de l’ACO et au Président Plassart, ainsi qu’à Jean Todt. »
Nous remercions Henri Pescarolo pour sa disponibilité, propos recueillis par Claude Foubert.