Retiré des championnats d’Endurance depuis un petit moment, Yves Courage n’en reste pas moins actif en sport automobile. Ses ateliers sont pleins d’autos avec un parc de Formule 1, de Courage et de voitures anciennes. Yves Courage est aussi distributeur Chevron pour la France. Ce n’est donc pas le travail qui manque dans la structure du Technoparc des 24 Heures du Mans. Courage Classic se porte bien avec un gros travail de restauration et de roulage lors de track days. Il est prévu que plusieurs Courage LMP1 reprennent la piste pour le plus grand plaisir des fans si les Michelin VdeV Endurance Series permettent cette présence. Trois personnes travaillent à plein temps dans les ateliers où l’on trouve également Michel Aubertin, ingénieur de génie vu chez Peugeot. Après un tour du propriétaire par Julien, Yves Courage nous a reçu pour un entretien afin de parler des activités de Courage Classic, mais aussi de sa vision de l’Endurance et de son souhait de revenir dans la discipline au plus haut niveau.
Laurent Mercier : Yves, comment se porte Courage Classic ?
Yves Courage : « Ce sera nos débuts en Formule 1 même si les voitures ont quelques années (rires). Ces autos sont complexes mais intéressantes. Le Classic est en plein essor. C’est un public de connaisseur et il suffit de voir combien de personnes ont fait le déplacement au Mans Classic. Il est dur de trouver certains modèles historique comme les Porsche 956/962. Nous développons une activité dédiée au Classic et elle prend de l’ampleur petit à petit. »
On peut donc revoir des Courage LMP en compétition ?
« Si la série VdeV accepte les autos, la réponse est clairement oui. Eric (Van de Vyver) est un visionnaire et cela nous ferait plaisir que de rouler dans son championnat. Il sait rendre les meetings sympathiques et agréables. L’ambiance y est vraiment bonne et saine. Il a fait un gros travail pour ramener des beaux plateaux avec toutes les conditions de sécurité. Si les LMP devaient courir en même temps que les autres protos, il ne faut pas qu’elles viennent gêner en quoi que ce soit. Nous avons des clients intéressés. Démarrer avec sept à huit autos serait vraiment bien. Cela ne sert à rien d’avoir près de 700 cv. A 600 cv, tout le monde est content et le coût en serait moindre. »
L’arrivée de Michelin dans le championnat est un plus ?
« C’est une valeur ajoutée. J’ai beaucoup de respect pour Michelin et nous avons toujours eu de très bonnes relations. Ils sont très professionnels et c’est une belle crédibilité que de les avoir. Je suis persuadé que l’apport des LMP ferait venir encore plus de public. Le championnat VdeV est une passerelle pour les autres séries. On a vu des pilotes commencer par le VdeV avant de se retrouver à l’échelon mondial. »
Quelle est votre vision de l’Endurance actuelle ?
« Je suis inquiet pour les privés et je ne vois pas d’ouverture pour bien figurer en 2014. Cependant, il y a toujours l’alternative LMP2 avec une catégorie très relevée car on peut dire que c’est la catégorie reine. Quand je repense qu’au début, les autos étaient peu nombreuses à l’arrivée. Au fil des saisons, la fiabilité est venue et les équipes ont répondu à l’appel. »
On voit encore que la majorité des châssis présents ont une base Courage. Une belle satisfaction...
« Sincèrement, je n’aurais pas pensé que ces châssis auraient eu une carrière aussi longue. Beaucoup ont été vendus et c’est une sacrée belle carrière. Ce n’est pas terminé puisque les Formula Le Mans roulent encore en Europe, aux Etats-Unis et bientôt en Asie. »
Selon vous, il y a trop de championnats ?
« Il faut voir les différents positionnements. Je pense qu’il y a de la place en Asie. Les Etats-Unis se regroupent pour ne former qu’un seul championnat en 2014. C’est cohérent même s’il faut voir comment vont évoluer les règlements. Sur un plan plus général, il faut faire attention car le contexte économique est dur et il y a moins de marge de manœuvre. Tout le monde attendait un Championnat du Monde d’Endurance depuis longtemps et ce championnat permet de disputer les 24 Heures du Mans. C’est une bonne vitrine pour les constructeurs mais l’histoire nous rappelle que les privés doivent être là. Il ne faut jamais oublier que les constructeurs peuvent partir et c’est là que les privés peuvent l’emporter. En LMP1, on a tendance à oublier ces privés. »
Et l’arrivée du nouveau règlement ?
« 2014 ouvre de nouvelles perspectives même si on en revient toujours à la même chose. Il faut que ce règlement prenne en compte les privés. Le delta de performance est trop important. L’allocation de carburant est facile à gérer. On a déjà fait cela dans le passé. C’est selon moi une bonne solution. »
Qu’en est-il d’un éventuel retour de Courage Compétition en Endurance ?
« Bien sûr, l’envie de revenir est bien là et elle ne se dément pas. On ne va pas être hypocrite. Cependant, on ne veut pas revivre les mêmes galères que par le passé. Si on revient, ce ne sera pas pour un one-shot. Pour cela, il nous faut les moyens. Objectivement, nous avons une cellule de veille qui suit l’évolution des choses. On est prêt à appuyer sur le bouton et on saurait se lancer dans une production assez rapidement. Comme je l’ai dit, il faut les moyens. Henri (Pescarolo) bloque pour cette raison. L’Endurance vit actuellement une belle époque. »
S’il devait y avoir un retour, ce serait prévu pour quand ?
« Si quelque chose devait se mettre en place, ce ne serait pas avant 2014. Que ce soit en LMP1 ou LMP2, l’étude est quasiment la même. On a connu cela avec les LC70 et LC75. Il y a quelques notions de crash-test différentes. Nous travaillons sur le sujet mais il faut que le projet tienne la route même si il peut y avoir une alternative de revenir différemment. Les discussions sont en cours. »
Quid du projet électrique ?
« Là aussi c’est une question de moyens. Le gros handicap reste les batteries. Nous avons perdu un partenaire, ce qui fait que le projet n’est pas plus abouti. Je pense que de toute façon il faudra adjoindre quelque chose à l’électrique. Tout passe par la récupération d’énergie. La Formule 1 va évoluer dans ce sens. Il ne faut pas oublier qu’il y a beaucoup d’énergie sur une auto. »
Propos recueillis par Laurent Mercier et Claude Foubert